lundi 4 décembre 2006

Place des martyrs... Martyrisée

14 Mars 2004 :

Nous étions quelques 300 étudiants à la place des martyrs, à demander l'indépendance, la souveraineté, des principes qui nous sont chers, nous les jeunes... 300 étudiants à se souvenir de la "guerre de libération" du général Aoun, et le quadruple en nombre des forces de l'ordre, de l'armée, et des citernes d'eau de la défense civile, une dizaine...
Ce jour-là, personne n'était avec nous, ni le Hezbollah, ni les futurs 14 Mars, ni les forces libanaises...
On était fous, personne ne nous soutenaient, là résidait vraiment le sens de la luttle pour la liberté...


14 Mars 2005 :

1 million et demi, de partout... C'était l'euphorie, de voir autant de monde qui soudainement, se sont mis à demander les mêmes choses que nous... J'avais confiance en ce mouvement, j'avais confiance en ses bases, les mêmes bases qu'un an auparavant (bien sûr avec en plus la "vérité" - ceci dit, laquelle? -) Je savourais les moments passés dans nos petites tentes, la guitare de David, les rencontres avec d'autres jeunes, les soirées chez les uns et chez les autres, les réunions des Amicales pour essayer d'organiser l'action de l'USJ.....

1 Décembre 2006:

Je regarde cette manifestation de loin, de très loin, et je ne sais pas si j'aurais aimé être au Liban en ce moment... Ce qui est sûr, c'est que c'est une 7ar2a bi albé, une déception, d'avoir donné 3 ans de mon activisme dans une chose qui finalement ne parait plus tellement prioritaire dans la vie politique actuelle, un Etat fort, un Etat tout court...
Du monde plus que durant le 14 mars, c'est très possible, mais l'esprit de la place de la Liberté, qui était déjà en déclin, s'enfouit sous les pieds des manifestants d'aujourd'hui...


Quand je pense à ces deux dates de 2004 et 2005, j'ai l'impression que c'était il y a vraiment très longtemps :) Et Quand je regarde notre place aujourd'hui, la place des martyrs, je réalise combien on martyrise cette place, son sens, son esprit, time after time depuis le 14 mars 2005...

Avec mon séjour-exil volontaire à Lille, je réalise que la vie est tellement plus grande que des manifestations, des tentes, des slogans qui, jour après jour se vident de sens, où la chère "résistance culturelle" de Père Abou semble être oubliée par mes anciens camarades, où, pour être vraiment écouté, entrer dans le jeu binaire qui d'après certains, remettent le champ libanais sous la confrontation de deux entités plus grandes que nous tous...

Avant cette manifestation/sit-in ouvert, les gens ont eu réellement peur... Il y a eu la guerre, et le Liban est resté, il y a eu la paix syrienne, et le Liban est resté, il y a eu une vingtaine d'explosions, et une dizaine d'assassinats, et le Liban est resté, il y a eu la mort de deux milliers de civils innocents, et le Liban est resté, alors, de quoi ont-ils peur? Et pourquoi ce refléxe alors que l'histoire a prouvé que le Liban demeure tel qu'il est quoi que les gens fassent, ni fédéral, ni annexé?

Bien sûr que j'ai eu peur, des FL de Ain el Remmané qui font des problèmes avec les gens qui veulent manifester, et vice-versa, et finalement, je suis soulagée de voir que les esprits restent calmes, et je me moque de moi-même quand je me dis que ça ne valait pas la peine que tout le monde me dise "le Liban est à la limite du gouffre"...C'est une phase, et ça passera, comme tout passe...

Entre "le Liban n'est pas l'Ukraine" (Nasrallah le 8 mars 2005) et "le gouvernement ne peut pas tomber sous la pression de la rue" (Sanioura il y a quelques jours) je reprends l'expression d'une bonne copine "Au pays de tous les paradoxes", Nasrallah qui utilise la pression de la rue aujourd'hui, Sanioura qui renie le fondement même de son accession au pouvoir!!! Et le général aujourd'hui prisonnier de son discours, pour de bonnes causes certes, mais sous une forme qui ne m'aspire pas confiance!!! En voilà un bon exemple...

Et puis, où sont les femmes dans les tentes? Où sont les filles du CPL? La participation dans la vie politique, ça vous dit quelque chose? L'activisme dans les grandes manifestations et sit-in, décidément, est masculin au sens le plus pur du terme, je ne pense pas que les filles soient acceptées dans les tentes pour y passer les nuits comme les garçons, alors, où est le cher principe d'équilibre dans la participation au mouvement? A ce que je me rappelle, il y avait bien un point dans le programme du général à ce sujet, mais pourtant, les filles ne sont pas les bienvenues dans les tentes, parce que l'année dernière, nombre d'arguments étaient élevés à l'encontre du camp de la Liberté, dont un en particulier qui visait à dire que quand il y a des filles, il y a du sex (OH MON DIEU!!!!!!)... Je peux vous dire, chers lecteurs, que ni j'ai fait, ni j'ai vu, ni j'ai entendu quelqu'un faire du sex en plein milieu du centre-ville entre 2000 manifestants par nuit dans quelques tentes :)
Alors pour cet argument du Hezbollah entreautres, et en tant que femme, je vous remercie pour le respect que vous nous portez, et je rappelles aux femmes du CPL qui ont participé comme moi au mouvement de 2005, que choisir entre respect d'être Femme et soumission en acceptant de ne pas dormir dans les tentes (donc du coût liberté individuelle et intégrisme) n'est pas très difficile...

Alors, de mon grand palace, en face de mon écran, je pense à mes anciens compagnons de "bataille", et dans quelle mesure ils se sentent aussi bien qu'en 2005 dans cette place de Beyrouth...

Finalement, et perso, ma vie ressemble aujourd'hui à un sprint vers l'indéfini, l'inconnu... Mais avec ce qui s'est passé avec Stroobia (pure coïncidence) jusqu'à maintenant, et avec ce mot en tête (...), je me dis que tout est possible, et ce qui se passera avec Stroobia, quoi qu'il se passe, sera résolument pour le meilleur, le meilleur indéfini, le meilleur inconnu...

lundi 13 novembre 2006

Bloggeuse : Pourquoi??

Lancer un blog, est pour beaucoup, un cri de coeur. Pour moi, mon blog était un cri de protestation, un cri de colère, de déception, mais de rage... Le satané 2 juin (pour les non-habitués : le 2 juin 2005) j'avais décidé d'écrire. Ecrire pour me défouler, pour le plaisir de pouvoir canaliser mes sentiments dans des textes qui sortent de l'âme. Tout au long de l'existence de ce blog, je m'en foutais de la quantité de personnes qui pouvaient le lire, mais j'aimais bien savoir que mes amis proches le lisaient, pour comprendre ce que je ressens à l'intérieur de moi-même, et pour partager les réactions à des évènements vécus en commun...

Je me devais d'écrire, pour dénoncer, comme une sorte de réaction aux assassins de mon prof, comme un message pour leur dire que quoi qu'ils fassent, il restera des personnes là pour écrire, critiquer, rêver, et penser au printemps... لتكون بيروت ربيع العرب...
J'y crois, parce que j'aime Beyrouth, et je veux le dire à chaque fois que j'écris dans ce blog, que je continuerais à espérer, peut-être à certains moments obscrus (comme maintenant) mon espoir sera moins apparent, mais il est là, et je le sens dans mes réflexions étrangement optimistes desfois...

Le satané 2 juin, je croyais l'espoir mourir, mais il ne faisait que perséverer malgré ma douleur. Les 36 jours de guerre, je le croyais perdu à jamais, même à l'instant j'ai du mal à le sentir, mais je sais que, rien de sert de vivre si on ne tient pas haut ses principes et ses espoirs. La fierté de la résistance, la cuisante défaite israélienne ne compensent malheureusement pas la mort des enfants, l'abrutissement des forces du 14 mars, du Hezbollah, du général Aoun, qui tous, sans exception, s'enfoncent dans des questions et orchestrent un show médiatique alors qu'ils savent que les décisions finales ne viendront d'aucun d'entre eux. Et puis je suis partie en France, et je me suis éloignée de cet exercice de bloggeuse, parce que j'en avais marre. MARRE.

Je n'aurais jamais imaginé quitter mon pays comme je l'ai fait. Je me rappelle que quand j'étais plus jeune, je me disais que je ne m'exilerais pas volontairement comme tout le monde pour pouvoir "vivre une vie meilleure". La vie n'est pas meilleure concrètement, en fait c'est psychologique : on se met en tête qu'on sera plus à l'aise à Paris, à Lille, à New York, à Montréal, à Beauvais. Il est vrai que cette auto-thérapie marche à merveille pour la grande majorité, mais la vérité est qu'on peut se sentir mal partout, indépendemment du contexte socio-politique global, mais j'avoue que quand c'est la situation qui est mal, on a plus tendance à s'imprégner de la situation qui va mal...


St Quentin, Paris, Marseille, et enfin Lille, je me disais qu'une fois la guerre mise à l'écart dans les discussions politiques, on reviendra aux disputes normales, à savoir la démission du président de la République, la Vérité après 638 jours de l'assassinat de Hariri, ce genre de banalités en fait si chères à mes anciens camarades de l'USJ, et je suis bien contente d'être sortie de cet environnement. Parce que le débat n'est pas là, et ces jeunes-là qui demandent le changement, ne changent rien parce qu'ils ne saent pas franchir le pas, ils croient que changer c'est rester dans l'optique des dialogueurs nationaux, ou plus récemment des négociateurs nationaux, pour eux, le changement, c'est voter pour un tel, fils d'un tel, contre les autres, qui sont au final, pareils. Même pour ceux que je considère comme les plus proches à la demande d'un vrai changement, le YAD, la gauche démocratique, ne fait que s'enfoncer dans son alliance, au lieu d'être vraiment un parti/facteur de changement, supposé être au-delà des dérives politisées!!! Ziad Majed, thésard à Sciences Po, se fait littéralement Cassé par Charles Ayyoub, et Elias Atallah (alors déjà lui en tête du YAD) se donne à une guerre médiatique avec Gebran Bassil (no comment)...


Et qu'est-ce qu'il aurait écrit???
Et comment les pages du malheur vont-elles s'effacer devant ma génération???



Si sans encore sortir de l'euphorie d'Independance 05 et on se fait encu*és déjà...

La Picardie avec son groupe séparatiste amiénois pourra accéder à l'indépendance avant que le Liban ne puisse gagner une vraie souveraineté et une sorte de système qui marche...

Appellez-le ce que vous voulez : consensuel, consociatif, communautaire, pas communaitaire, à caractère communautaire, séculier avec des excéptions, égalitaire, BLEH!
Ca fait déjà 75 ans que des intellectuels se penchent sur cette questions pour essayer de trouver un système souverain qui puisse fonctionner sans qu'il n'y ait de guerre majeure chaque 15 ans de notre histoire contemporaine!!

Je suis bloggeuse depuis le 5 juin 2005, irrégulièrement certes, mais je suis bloggeuse, parce que je rêve d'une autre réalité. Et ce monde virtuel qu'est Internet, me donne la possibilité de m'évader vers ce rêve, imaginer un voyage à Jérusalem, et voir que d'autres rêvent également de faire le chemin inverse tel le bloggeur Shai 2046 : http://israel2046.blogspot.com/2006/06/scenic-route.html !!! Imaginer un Liban où les photos-souvernirs (i.e. fameux dialogue national) n'existerait pas parce qu'on en aurait pas besoin, puisqu'on parle la même langue et on peut s'entendre entre nous sans aller jusqu'à Riyad, ou Téhéran, ou Paris, ou Washington avant ou après les séances photos...

Les voitures piégées, les bombes, les morts, c'est pas vraiment mon truc, c'est pas le truc de beaucoup de monde, qu'on soit de Beyrouth, de la Montagne, ou du Sud, mais ce qui tend à les maintenir en suspens, c'est nous!!!
Moi, j'écris pour combattre à ma façon, mais que font les autres? Ils foutent la merde à la fac pour des élections d'une amicale qui ferait mieux de ne pas exister parce qu'elle ne fait qu'une seule conférence dans l'année, pas de soirée, pas d'intégration, rien...

Dans mon cours de système des Nations Unies, auquel j'assiste en ce moment (maintenant) je me demande plein de questions sur le conseil de sécurité, et si oui ou non le Brésil peut être un membre permanent.... Et je réalise que finalement, on vit dans ce même monde, où qu'on soit, mais qu'on est à des années-lumières les uns des autres.

Déjà la différence entre Kfar Kila et Metula, Naqoura et Safad, Beyrouth et Damas, Beyrouth et Tel Aviv, Damas et Tel Aviv, Tokyo et Beyrouth, Tokyo et Tel Aviv... Plus on s'éloigne dans l'espace, et puis on tend à voir les points en commun...
Plus on s'approche, et plus on plonge dans des différences sans fin arrivent même à distinguer Sassine de Fassouh, Furn el Chebback de Badaro, Ain el Remmaneh de Chiyah (oh lala la grande différence)...!!!!!!!!!!!!!!


Alors, il vaut mieux être entre Beyrouthins, Tripolitains, Berjeinois, Nabi-Shitiens, Nabatiyyotes sur un même palier de la résidence, que chacun dans sa région au Liban. A bon entendeur, Salut!!!

16 octobre : Quelqu'un de spécial

Quelques fois, on ressent un besoin énorme d'être avec juste une seule personne, quelqu'un de spécial... Quand on se sent mal, presque abandonné, malgré l'entourage bruyant et super bruyant des amis et des sorties, mais avoir des moments calmes avec ce quelqu'un, qui nous booste, qui nous soutient, qui nous aime.

Il m'arrive de plus en plus fréquemment, de penser à cet être cher, qui bien évidemment, n'existe pas. Quand je pense qu'il aurait pu exister, qu'il existe réellement mais qui n'est pas/plus quelqu'un de spécial, je me demande comment les gens peuvent continuer à vivre, ou faire des choses contraires à ce que leur personnalité d'origine (ou celle qu'on connait) ne ferait jamais. Je dirais, le mensonge, l'hypocrisie, la haine, la rancune. Parce que ce quelqu'un de spécial, la meilleure chose dans la vie de l'autre, est une personne qui dans une situation inverse, qui peut tuer par sa rancune.

Et quelle rancune, et quelle haine, que je ne croyais possible que dans des films ou romans d'amour, des histoires d'adolescents aussi, mais pas dans des histoires d'adultes. On pourra me dire "20 ans, pour quelqu'un de spécial, c'est très adolescent"... Peut-être, sauf que, les sentiments sont normalement au dessus de tout... Quoique, les sentiments étaient supposés être spéciaux aussi, en réalité, ils n'étaient qu'illusion. Illusion de ce quelqu'un de spécial.

On vit, on est content, on traverse une guerre, on l'est un peu moins... Quelle que soit la situation dans laquelle une personne est, il est rare que ce quelqu'un de spécial soit considéré d'un jour à l'autre comme quelqu'un de "pas/plus spécial", c'est là où généralement, on réalise qu'on est cons, qu'on s'est laissés emportés par quelqu'un qui n'était pas conscient de cette chose spéciale entre les deux, qui disait des mots sans connaitre leur vrai sens, parce que sinon, la rancune n'existerait jamais, ni la haine.

Je pense à la politique, aux martyrs du 13 octobre, je pense à la parade indienne de Lille, à Muriel, à mes amis, mes vrais amis, ceux qui disent m'aimer en le vivant vraiment, à ces petits adolescents qui ont traversé dans ma vie en me disant combien ça allait être "quelque chose de spécial" alors que c'était juste une façon pour eux d'avoir une fille dans leur vie, et j'en ris. C'est vrai que certains ont été très sérieux, ont fait des efforts, ont proposé de faire les choses les plus folles pour qu'on soit ensemble, m'ont vraiment aimé, et par ma connerie peut-être, par la pression de mon entourage, je ne les ai pas vus... J'ai raté, je sais, des aventures, entreautres une, qui aurait pu être incroyable, mais leurrée par la facilité de sortir avec quelqu'un de plus proche "culturellement", en fait je ne faisais que m'enfoncer encore plus dans des relations dénudées de sens, attirer parce que je suis brune et orientale, penser aimer parce qu'on est attaché au Liban si l'on est français...

Peu importe, peu importe.

21 ans, ça se fête? Je ne sais pas encore. Mais quand je me dis que "quelqu'un de spécial" fera sûrement la fête sans trop penser, en ce même jour, je me dis que c'est moi la conne qui pense encore dans cette perspective. Les jours d'été, les rares jours d'été, sont terminés, à moi l'anniversaire sans quelqu'un de spécial, l'hiver sans quelqu'un de spécial, essayer d'imaginer comment ça aurait pu être, sans pour autant regretter, jamais regretter.

Jamais regretter, parce que quelqu'un de spécial m'attends quelque part, d'encore plus spécial, parce qu'il saura qui je suis, il saura qu'on pourra se donner enfin les meilleurs moments d'une vie, sans peur, sans hésitation : fermer les yeux et partir dans le vide, pour construire, réaménager, reconstruire, consolider, et surtout rêver...

mardi 10 octobre 2006

Octobre

Octobre...
Ca fait longtemps que je n'ai pas eu de temps à consacrer pour écrire, réfléchir, à certaines choses comme je le faisais en été... Je commence par quelques petits passages que j'ai écris rapidement durant ce dernier mois...

"Ca fait déjà un mois et 10 jours que je suis là... J'aime ma vie, par contre, j'aimerais ne pas avoir beaucoup trop de soucis, à appeller les soucis de septembre ou de la rentrée, les dépenses non calculées, non contrôlées qui peuvent gâcher le reste de l'année... A quoi je pense alors que la misère et le désespoir est encore omniprésent à Beyrouth... Hier, il y a eu l'officielle remise des diplômes à Beyrouth, j'aurais aimé être là, parmi mes copines, qui me manquent plus que tout...
A la place, avec mes potes à Lille, j'ai fait la fête comme rarement je ne l'ai faite, histoire d'oublier qu'ailleurs, à Beyrouth, j'aurais fait la fête avec mes copines. Hier soir, j'ai réalisé combien leurs amitiés me sont précieuses, et même si je rencontre chaque jour des gens nouveaux, et je me fais des amis, je ne pourrais jamais les comparer à mes copines..."

"Bientôt, on sera en octobre, il fera froid, pas la peine de se souvenir du pays, c'est comme si on se préparait à une nouvelle guerre civile... Pourquoi? Demandez au rassemblement de Harissa, à Geagea, qui instrumentalise les martyrs des Forces Libanaises, qui trahit l'esprit du 14 mars encore et toujours dans la logique "s'ils font des fautes, on en fait aussi pour mieux aboutir à ce qu'on veut"... On me dira, tu rêves, tu vis dans une utopie, tu croyais quoi, que tout le monde allait être convaincu par les paroles des intellectuels, qu'ils allaient réellement changer les choses, les mentalités... Je l'espérais, bien sûr, de tout mon coeur... Je comprends leurs peurs, leurs paranoias, sincèrement, mais je croyais qu'ils feraient au moins l'effort de limiter la paranoia du peuple, eux les grands cadres du DIALOGUE NATIONAL... Mais c'est encore quelquechose qu'on ne peut pas demander au Dialogue National. J'aimerais bien le renommer : Séance photos/souvenirs."

Déjà Octobre, pas très froid quand même... La fac, ça va, déjà un exposé, apparemment bien fait, les amis, très bien, les sentiments, un peu moins... Presque chaque soir, je regarde mes photos à Beyrouth, j'essaie de suivre sans m'énerver les nouvelles... Chaque soir aussi, depuis déjà 2 semaines, je dîne avec mes amis à la résidence, qui cassent leur jeûne!!! L'ambiance est géniale, je pense que je n'aurais jamais passé par là si j'étais restée à Beyrouth, en plus, faire un iftar chaque jour avec les libanais de la résidence crée une relation assez spéciale, une amitié profonde...
En écoutant de la musique arabe, plus tard dans les soirées, chacun entre dans sa bulle, chacun a ses souvenirs, ses images ancrées dans sa tête: le village, la famille, les amis, la guerre, les adieux de chaque été... En écoutant Marcel Khalifé avant de m'endormir, j'entre dans ma bulle spéciale, j'ai mes souvenirs, mes images dans ma tête, dans mon coeur, celles de Beyrouth... Beyrouth me manque, son rythme me manque, sa place de la Liberté me manque, Mar Mitr me manque... Et puis, je sais que si j'étais à Beyrouth maintenant, je me serais projetée à Lille, et maintenant, ce n'est pas que je me projette à Beyrouth, mais quand je ferme les yeux, et que je veux m'imaginer quelque part, je m'imaginerais près de la statue des Martyrs, ou au 37degrés, rue monot...
Ce qui me manque un peu, et qui, ne devrait théoriquement pas me manquer, c'est la rue monot du samedi soir, avec les filles blondes aux talons aiguilles et leurs décolletés signés, filles à papa en Mercedes, elles me faisaient rire... Ici, celle qui me font rire sont celle qui arrivent à la fac avec un pantalon vert, avec une jupe orange en dessus, et un pull violet (j'ai vu ça aujourd'hui), et comble de l'histoire, qui ira ce soir (à 300%) à la soirée avec les mêmes habits. On se distingue par ce qu'on porte, flashy dans tous les sens, trashy ou daddy's girl, pour les françaises c'est d'une façon, et pour les libanaises, c'est d'une autre façon... Au moins les libanaises essaient tant bien que mal d'être classy, ce que les françaises en ont rien à foutre de classy ou pas...

J'ai fait beaucoup de rencontres, certaines intéressantes, d'autres moins... Déjà les nouveaux libanais de la résidence, les camarades de conf, les mecs de l'IEP en soirées qui cherchent à s'amuser, un palestinien par pur hasard... Je pense que la rencontre la plus intéressante a été de Jamal, que j'ai rencontré à une soirée Erasmus, il parlait dans un arabe que je comprenais, contrairement au barman (marocain) que je ne comprenais absolument pas. Les discussions à partir de cette soirée m'ont fait découvrir quelque chose... C'est que, malgré nos différences fondamentales dans un nombre considérable de sujets, on n'est finalement pas si différents... Je réalise que c'est maintenant que je suis capable de parler de tout ce que Samir Kassir a voulu dire sur les préjugés, tout ce qu'il y a de mal, qui limite notre découverte du monde et des autres. Le préjugé du Palestinien méchant, qui veut prendre notre terre, raser nos villages, tuer les libanais : il y en a des palestiniens qui n'en ont rien à foutre, qui ne sont peut-être pas au courant de tout ça, ou qui sont complètement en dehors du système, qui ont leur vie ailleurs, qui aiment Wadih Al Safi et Fairouz, et Nizar Kabbani...

J'aurais 21 ans dans exactement 9 jours... Beaucoup de gens m'ont dit ces deux dernières années que je ne faisais pas mon âge, s'ils lisaient ce que j'écris ou s'ils m'écoutaient parler... Peu importe (si, mon ego a grandi un peu), 21 ans, je ne sais pas si je devrais être triste ou contente... Triste parce que je deviens plus âgée, je suis une femme maintenant, plus une gamine qui peut se permettre de faire ce qu'elle a envie de faire en sachant que son prétexte est son âge, triste parce que je pourrais voter au Liban enfin, triste parce que c'est quelque chose qu'on ne peut pas arrêter, j'aurais 30 ans, 40 ans, 50 ans... je ne peux pas m'arrêter à 20 ans (si seulement je pouvais le faire)... Ou plutôt contente parce que justement je gagne de l'expérience, parce que je deviens majeure au sens libanais du terme, que si je rentre au Liban on ne me regardera plus comme une gamine qu'on peut réduire au silence du fait de la connerie de tout me monde, 8 mars ou 14 mars...

Bref, en gros, ca va, ca va encore mieux depuis que Muriel est à Paris, je vais la voir bientôt, je parle avec Tony qui est à Nancy maintenant chaque jour, je suis contente que Cyril soit encore là...

Au programme pour la suite : Le w-e du 21 octobre, soit le w-e de mon anniversaire, je serais à Paris, pour la grande : "Réunion familiale des Frayx des Khoury" (les conférenciers seront : Peutrayce, Cayx, et moi)

jeudi 31 août 2006

Thoughts from Marseille

Ville de Marseille, il y a trois jours déjà : face à la mer, avec une Leffe (pression 33cl s'il vous plaît), je regarde le paysage, "mélange de bleu et de blanc", le bleu de la mer, le blanc des grands rochers calcaires, et c'est comme si je ne suis pas là... A travers mes cheveux qui forment une sorte de crinière à cause du vent, j'arrive à apercevoir des personnes qui se baignent... Ca fait du bien d'être là, coupée de tout, ou presque... Les amis présents me demandent des nouvelles du Liban, pour être courtois, sans qu'ils n'y comprennent grand chose, et en guise de réponse, je leur fait une analyse méthodique de beaucoup de choses, des actions du gouvernement libanais, des actions du gouvernement israélien, de l'opinion publique libanaise, de l'opinion publique israélienne, en concluant qu'on avait beaucoup trop rêvé l'année dernière, beaucoup trop...

Quelle est ma position à moi... Est-ce que le printemps de Beyrouth a réellement existé? Si oui, pourquoi en sommes-nous si loin, comme si rien n'était fait? Pourquoi la mentalité des gens est presque toujours la même, pourquoi croyons-nous si fort en quelque chose qui se révèle comme une utopie? Je sais qu'il faut espérer, et l'espoir est là, je ne baisserais pas les bras, loin de là... Mais, je me pose beaucoup de questions... La 3ème voie, on en parle, on la choisit, mais en fait, personne d'autre ne la prend, et on arrive à une impasse, parce que peu de gens y croient, et rares sont ceux qui savent qu'elle peut exister, la majorité, se donnant toujours au profit du grand gagnant, et bien que je pense que le grand gagnant est le Hezbollah, cela ne veut en aucun cas signifier que je sacrifie mes principes à ceux du Hezbollah. Par contre, si je réussis à faire la distinction, et justement de croire en une troisième voie, je pense cependant que l'ensemble du peuple libanais se soumet au court terme à cette victoire, entrainant, au long terme, un échec torturant du printemps de Beyrouth...

En même temps de ces explications, mes rêveries me prennent au coeur de mon combat dans Independance 05, et je pense, inéluctablement, à mon prof... Je pleure encore, je me dis que c'est impossible, j'arrive même à être en colère contre lui pour être parti... Ce satané 4 juin, ses filles nous dit (nous ses étudiants) : "si vous l'avez aimé, ne pleurez pas, faites vivre ses idées"... Et quoi qu'on dise, ça fait mal de se dire que ce que je dois faire maintenant, c'est de faire vivre les idées d'un homme assassiné (le terme martyr étant un mot qui était source de sa satire), alors que ça aurait été tellement plus facile de prendre le bout à droite de la première page du Nahar et la traduire un peu pour expliquer ce qu'il aurait dit sur ce qu'il se passe... Je relève le défi. Je veux que mon entourage sache ce qu'il aurait dit, du moins ce que je pense qu'il aurait dit, je veux aller le voir dès que j'arrive au Liban, et lui dire que même si on est un peu loin d'être "mission accomplie" (chose que je lui dirais sûrement de mon vivant), lui dire que ça évolue, plus lentement que ce qu'il aurait voulu, mais ça évolue... J'aurais par contre beaucoup du mal à lui expliquer ce que son député de gauche est en train de faire au parlement (ah pardon j'ai oublié qu'il était dans une liste ultra-libérale qui veut du Liban un paradis fiscal)...

Je me suis sentie triste, en regardant la mer, après cette sorte de monologue/rêveries dans mon coeur, j'ai pris un grand souffle de l'air marin, et j'ai soupiré, comme je ne l'ai jamais fait auparavant... Malgré ma tristesse, je sais qu'au fond de moi, je ne suis qu'une grande optimiste, malgré la politique, malgré l'amour cassé, malgré mon éloignement de chez moi...

La semaine prochaine, je serais dans le Nord, là où il pleut et il fait froid, à faire mille et une choses essentielles pour m'installer à Lille... Alors bizarrement, je me sens obligée d'être optimiste. Ca ne sert à rien de commencer une nouvelle vie si on est pessimiste au départ, et peu importe les circonstances qui nous rendent pessimistes (qui existent évidemment dans ma vie), je pense pas que ça serait une attitude à adopter quand on sait qu'on a encore toute la vie devant soi, de nouveaux amis, de nouveaux amours peut-être, une stabilisation de situation au Liban, en Syrie, en Palestine, et en Israel...

Alors, it's time to move on, et pour le coup, on boit une bonne, très bonne bière, qui change de la "Almaza" traditionnelle (même si heyda jawwna, heyda ne7na - ça le restera toujours -) en face des voiliers, et des vagues, c'est beau, et ça fait du bien, beaucoup de bien.

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Hier, nous sommes allées bronzer dans une calanque de La Ciotat, qui ne fait passer que peu de mistral par rapport à la plage ouverte... Bronzer là bas est probablement un des meilleurs bons plans de la région. De grandes roches nous protègent, Carine et moi, dont une qui ressemble etrangement à la tête d'un aigle... Rien à voir avec les rochers de Amchit ou de Jbeil... Au moins ici, on est à l'aise, à faire ce qu'on veut, sans se soucier des regards rivés sur n'importe quelle position, activité ou n'importe, que nous faisons.

Je pense à Beyrouth, et je pense vouloir répondre au commentaire de Raymond... Beyrouth c'est ma ville, je l'aime et je crois en sa beauté, en son originalité. Beyrouth, c'est la douceur de vivre, sans stress et sans contraintes, une dolce vita que tout le monde possède, enfants, jeunes, adultes, et vieux... Paris, c'est la liberté de vivre, de se sentir tout petit dans un monde trop grand, où chacun peut élire son chez soi. On choisit de vivre à Paris, parce que c'est beau, on investit dedans parce qu'on l'aime mais qu'on s'aime aussi, et on aime avoir un bon boulot, dans une grande capitale européenne... On choisit de vivre à Beyrouth, parce qu'on l'aime, et on se sent non seulement chez soi, mais on sent appartenir à son histoire, qui se joue en face de nos yeux encore... Pour moi, il n'y a aucun doute, si on me donnait le choix entre vivre à Paris ou vivre à Beyrouth, je choisirais Beyrouth. C'est vrai que c'est pratique de vivre à Paris, et c'est vrai que j'ai une passion pour Paris, pour Lille, mais la passion que j'ai pour Beyrouth est inégalable, passion pour ce que Beyrouth cache en dessous de ses cendres, de ses ruines, dans le coeur de chacun de ses habitants, entre les lignes des livres écrits à son sujet, à travers le sang de ceux qui sont morts à cause de leur croyance en Beyrouth, libre, libre, forum du monde arabe... C'est grâce à ça que je me dis, Beyrouth me donne des impressions, une façon de vivre, une attitude, une philosophie, que Paris ne pourra pas me donner, et que je chercherais à ce que ma carrière se fasse à Beyrouth, mais si la vie en décide autrement, l'important, c'est que je ne me déracine pas avec le temps qui passe...

jeudi 24 août 2006

Quelques pensées/rêveries dans les trains

Vendredi 18 (saint quentin - Lille) : Je suis dans le train... J'écoute Ya Beyrouth de Magida el Roumi, elle me motive cette chanson... Je suis dans le train, mais pourtant, mon coeur est à Beyrouth, se promenant dans tous ses quartiers...

Je vais à Lille, pour l'après-midi, je lis Le Monde d'aujourd'hui, je porte un pull, et une jackette, et je lis un article sur le sentiment israélien de défaite... Je suis fière, même sic'est le Hezbollah, mais je suis fière quand je lis qu'un ex-chef du Mossad déclare que les objectifs et les méthodes utilisées étaient vituels et complètement "erronés"... Pareil pour un ex-chef des renseignements militaires, qui dit que ça sera la dernière fois qu'un chef de l'état-major sera issu de l'aviation... Surtout si aviation a rimé avec crise de nerfs et Halutz qui s'est tapé 2 jours à l'hôpital pour ça...

Les vrais hommes d'Israel, Ben Gourion, Sharon, seraient allésdroit au but, avec probablement autant de dégâts ou plus dans l'infrastructure, mais moins d'immeubles résidentiels détruits, et je dirais, moins d'enfants morts... Je spécule mais je sens vraiment que les hommes de décision en Israel aujourd'hui ne sont plus ce qu'ils étaient auparavant,maintenant ils sont désavoués,l'opinion publique ne les soutient plus comme avant, ce qui prouve non seulement plus de démocratie mais aussi la volonté des israéliens de ne pas foutre le bordel à chaque évènement qui se produit dans la région, parce que forcément ça se répercute sur eux...

Ma maison actuelle, c'est les quais des trains, la gare du nord, de lyon, marseille saint charles, lille flandres, saint quentin... Je me dis que j'ai encore un mois avant de me sentir réellement chez moi, un mois encore à silloner la France, à faire des trajets fatiguants plusieurs fois par semaine...

Je me sens esseulée desfois, quand je sens qu'après tout, je ne suis pas chez moi, et je suis loin de mon chéri...

Lundi 21 (Paris gare de lyon - Marseille saint charles) : Me voilà en route pour Marseille... J'espère que le temps sera bien, j'en ai besoin pour le resourcer...

Paris était magnifique, je pense que le meilleur moment de ce w-e était la soirée passée avec Nadine... Le sushi en face du St Michel (sushi qui normalement me fait penser à Matthieu, Muriel et Nouchka), la glace d'Amorino (c'était Camille qui m'en avait parlé) sur un pont de la seine, la ballade dans ce quartier, dans ses petites ruelles absolument incroyables, il faisait bon d'être à Paris!!!

Je pense, enfin j'imagine, que le Tsunami a réouvert ses portes, et que la vie à Beyrouth reprends son cours, tant bien que mal, mais que tout le monde arrive à mettre un peu du sien pour espérer que ça évolue positivement!!

Je devrais penser à lire mes blogs répertoriés dans "Mes Favoris", je devrais penser à écrire quelquechose, mais ma vie est tellement en mouvement, que j'ai besoin de ces lignes pour décrire uniquement ce qui m'arrive. Quand à mes chers amis bloggeurs, je lirais tout dès que j'aurais le temps, et surtout dès que j'aurais moins de choses prioritaires à faire...

jeudi 17 août 2006

Je flâne...

Je flâne au dessus de tout...

Je commence une nouvelle vie, je m'habitue de nouveau à la France, à la pluie Picarde d'août (je suis en ce moment en Picardie, chez mon chéri), au vent du Nord quand je vais à Lille, ça ne me gène pas... Maintenant je sais que non seulement je me sens mieux, mais mon pays respire, difficilement, mais apparemment, l'espoir est présent dans tous les coeurs, ça me laisse espérer aussi...

Je devrais probablement effacer mon dernier post, parce que 30 minutes après l'avoir posté, je reçois un coup de fil de la fac qui me dit que le papier est prêt, un papier qui prouve que j'ai eu ma licence!!! J'y vais, et le lendemain, le jeudi 10, à 8h du matin, je vais recupérer mon visa, avec une demande urgente, et, à 11h30, j'étais dans la queue... Puis au lycée franco-libanais, à attendre, à rencontrer des anciens camarades de mon lycée, une connaissance de la plage, et Nadine... Sa présence m'a réconfortée, j'avais l'impression que je la connaissais tellement bien, je lisais son blog (et le lis toujours d'ailleurs) chaque jour...

Bientôt, des tracts tombaient du ciel (disant que l' IAF allait bombarder Chiyah près de chez moi), en même temps, mes copines m'appellaient sur le portable de Nadine, parce que j'avais laissé le mien avec ma maman... C'était un peu douloureux de se dire qu'en quelques heures je vais m'en aller, alors que je croyais que j'allais voyager vers le 20 août... Un peu perdue, j'ai même oublié mon petit pull dans le bus entre le lycée et le port...

Bref, le Jean Bart, et le Mistral, impresionnants... vous pouvez lire les impressions de ma partenaire de route, http://nadche.blogspot.com dans ses deux posts : "wsolna" et "de la 1701 à l'honneur des peuples"... la photo sur le pont du Mistral, laissant l'écume, c'est moi qui l'ai prise... Tout le monde avait sa caméra, son portable, et prenait des photos de cette vue, triste...

Sur le pont grandiose du Mistral, j'ai vu Beyrouth s'éloigner, de plus en plus, et je restais figée en face du port, de Beyrouth, de la côte, de la montagne, du brouillard qui couvrait comme toujours Harissa... J'ai eu l'impression que c'était Beyrouth qui partait, pas moi, c'était Beyrouth qui rapetissait minute après minute, qui disparaissait... Je ne sais pas pourquoi, mais j'avais peur pour Beyrouth, à ce moment là, tout ce que je n'ai pas pu faire avant de partir me paraissait comme un regret, je ne voulais pas que je m'en aille comme ça, mais paradoxalement, je n'en pouvais plus de voir les infos 24/24 7/7, de voir la destruction, les enfants morts, le château de Beaufort (célèbre château croisé du Sud) bombardé, le temple de Bacchus qui ajoute sur ses fissures déjà apparentes des séismes et tremblements de terre (qui ont détruit Beyrouth) des fissures à cause du bombardement incessant de l'IAF...

Le Mistral laissait une écume énorme, et en avançant à sa vitesse maximum, c'est comme s'il tissait un gros fil qui me connectait toujours à Beyrouth, Beyrouth qui, en disparaissant de mon champ visuel, était pour moi dans une situation inconnue... Bientôt, je n'ai pu voir que la lune, ses reflets par milliers sur la mer, la mer, et la fregate (le Jean Bart)... J'ai passé un bon bout de la soirée, assise sur le bout du pont du Mistral, à regarder cette quasi-pleine lune et ses reflets, qui illuminent mon visage et les visages d'une vingtaine de personnes présentes à ce moment... Sans dire un mot, je me suis laissée aller en observant cette image fixe, à me dire combien la vie peut nous réserver des surprises, qu'on soit obligé de tout changer sans que l'on ait envie de le faire, et surtout, de voir combien avec de simples détails de la vie quotidienne, tout le reste d'une vie peut changer...

Les conversations avec les personnes sur le navire s'articulaient autour de la raison pour laquelle on s'en allait, si on avait une "base" en France, si on allait continuer à vivre en espérant rentrer un jour chez soi...

Aujoud'hui, et une semaine après cette aventure, je flâne au dessus de la Picardie, là où je suis en ce moment, je rêve de Beyrouth, de cette façon de vivre unique, de se laisser emporter par la douceur de la vie là-bas... Je flâne au dessus de Paris, je ne savais pas que cette ville m'avait tellement manquée, avec, à la place du sentiment de douceur, le sentiment de liberté, me sentant tellement petite en face du monde entier qu'aucune contrainte existe...

J'ai marché dans les rues de Paris, en chantant dans mon coeur "tousbihoun 3ala watan" de Marcel Khalifé (que vous soyez un jour dans une patrie)... J'ai pensé aux députés israéliens qui n'ont pas le droit d'objecter au discours d'Olmert, j'ai pensé aux libanais qui vont voir leurs maisons détruites, et le risque de voir une bombe exploser ou une mine déposée, ces libanais qui, face à la destruction totale de leurs propriétés ne peuvent rien dire autre que "fida el sayyed"...

Côté perso, l'été en Picardie c'est 20° maximum, et des pluies quotidiennes, un peu de soleil et le bronzage qui disparait... En septembre dernier à Lille il faisait un meilleur temps... J'irai dans le sud bientôt en espérant que je vais pouvoir bronzer et me sentir encore un peu mieux, et surtout à mieux me préparer pour la rentrée et l'hiver du Nord...

Je ne dirais pas comme l'année dernière :

En avril, je me suis dite que l'été 2005 allait être le meilleur été qui puisse exister pour le Liban, et pour moi. Je me suis trompée. Meme si je pars à la plage, je sors diner, je sors boire un verre, je reviens toujours à mon sentiment de colère, de douleur, de chagrin.

Pour le moment, je ne peux penser à rien. Je n'ai pas vraiment l'envie, ni la patience. Je m'en vais au nord, comme ca au moins, il fera la même température a l'intérieur et a l'extérieur de mon corps, de mon coeur.
(http://libertetjs.spaces.live.com/blog/cns!680A5F7AA7B8E319!115.entry)

Je me contenterais de dire que dans mon coeur, et dans mes pensées, il fera toujours chaud, prête à se jeter dans une piscine pour se rafraîchir, en me disant que jamais rien n'est fini, jamais rien ne mérite qu'on perde espoir en sa cause... 1400 personnes que je ne connais pas sont mortes cet été, 1 personne que je connais est morte le printemps dernier, pas pour la même raison, mais ils sont tous morts à cause d'un simple bouton, et ça, quelles que soient les victimes, et pour n'importe quelle raison, je suis contre, et je me batterais toujours, contre leurs assassins, jusqu'à ce qu'ils admettent leurs crimes : la Syrie, et Israel... Je sais que je rêve, et ce rêve est loin de se réaliser, mais au moins, je sais où je dois me mettre par rapport aux deux... JE VOUS AIME PAS (et voilà, ça, c'est fait!).

mercredi 9 août 2006

Grand Merci du fond du coeur à l'USJ

Bonjour à tous,

Je voudrais premièrement souhaiter bon courage à tous ceux qui sont engagés pour aider les déplacés, ce n'est pas facile, mais j'espère que tout ce que nous sommes en train de faire ne partira pas en l'air dans les jours qui viennent...

Comme vous devez déjà le savoir, je suis acceptée à l'IEP de Lille pour y faire mon master. La semaine dernière, mon visa est arrivé. Après un bon moment de réflexion, j'ai décidé de voyager le plus tôt possible, pour des raisons personnelles premièrement.

Je suis allée à l'ambassade, afin de retirer le visa, et malgré le fait que je sois là, la réponse était claire : J'avais besoin d'un relevé de note ou de mon diplôme qui prouve l'obtention de la licence. (Mais je l'ai eu ma licence! circonstances exceptionnelles etc... rien à faire)...

Voilà que je pensais à quelque chose d'extrêmement superficiel par rapport à la situation du pays... Mais bon... Je fais des appels téléphoniques avec les gens de l'administration à sciences po (ceux qui ont accepté de me donner leurs numéros bien sûr, pas ceux qui croient qu'ils sont intouchables et qu'on va les harceler parce qu'on les aime tellement) et on m'a dit que mercredi je pouvais récupérer le papier dont j'avais besoin pour mon voyage de... dimanche passé. Premier départ : Raté.

Aujourd'hui, c'est mercredi, j'appelle à la fac à 8h30, puis à 9h30 et enfin à 11h30 pour que cette grande personne soit présente, et tiens, il faut une semaine pour que le papier soit prêt. Diplôme? Il n'est pas prêt encore, ah bon, en gestion ils sont 250 personnes et ils ont eu leurs diplômes il y a 3 semaines déjà, nous sommes 15 personnes... Deuxième départ (qui coûtera 500$ en plus de celui de dimanche passé) prévu pour vendredi : RATE.

Certaines personnes ont la chance de pouvoir partir aujourd'hui, pas demain, pour mieux s'installer en France, et surtout, pour se sentir un peu plus utile que distribuer des médicaments aux déplacés en faisant quelque chose pour toucher l'opinion publique de l'extérieur. Et à l'USJ, je suis désolée, mais ils s'en tapent. Et franchement, je ne comprends toujours pas pourquoi ils agissent de la sorte. Les gens de l'administration se croient en "vacances", alors que le pays part en fumée et que les personnes qui peuvent partir de là sont obligés d'attendre le bon vouloir de ces gens-là, et donc sont obligés d'attendre longtemps, très longtemps...

Et mon visa? Il attend, il attend ce papier. Le voyage, il attend ce papier. Moi, j'attends ce papier. Mes parents, ils n'attendent que ce papier. Tout autour de moi, attend ce papier. Ce papier? Il a besoin d'une touche (c'est la touche ENTER), et d'une signature, qui ne prend pas plus de 15 secondes.

Mais je dois attendre, encore 7 jours, encore projeter pour un voyage déjà périlleux, et me dire qu'il va me coûter encore plus cher cette fois-ci, mais ce n'est pas grave, les gens de l'administration sont en "vacances", "ils ne sont pas obligés" d'aider quelqu'un qui peut partir de là, de donner un futur à leurs anciens étudiants ailleurs que chez eux, un futur qui donnerait une meilleure perspective face à la situation.

Alors, merci beaucoup à l'USJ, 3 ans mémorables d'une administration géniale, qui prouve sa compétence jour après jour.

A bon entendeur, ma fi salut.

lundi 7 août 2006

7 Août : Li Beyrouth...

Voilà une chanson de Fairouz qui, je pense, décrit au mieux ce que je ressens quelques fois au fond de mon coeur et que je n'arrive pas à extérioriser... Même si cette chanson est pessimiste, je tiens à signaler que dans mon coeur, il restera toujours une grande lueur d'espoir... Je crois en Beyrouth...

لبيروت, من قلبي سلام ٌ, لبيروت,
و قُبَلٌ للبحر ِ و البيوت, لصخرة ٍ كأنّها وجهُ بحّاراً قديم ِ...
هي من, روح ِ الشّعب ِ خَمر ٌ, هي من, عَرقهِ خُبز ٌ و يسمين,
فكيف َ صار َ طَعمُها, طعم ُ نار ٍ و دُخان ِ...

لبيروت, مَجد ٌ من رماد ٍ, لبيروت,
من دَم ٍ, لِوَلد ٍ حُمِل َ فَوق يدِها,
أطفأت مدينتي قِنديلها, أغلقت بابها, أصبحت فالمساء وحدها,
وحدها و الليلُ

أنت لي, أنت لي, آه ِ عانقيني, أنت لي,
رايتي و حَجَرُ الغَدِ و موج ُ سافرين,
أظهرت جِراح ُ شَعبي, أظهرت دمعات ُ الأُمّهات,
أنت لي, أنت لي, آه ِ عانقيني.....

PS : Ne soyez pas trop sévères avec l'orthographe ou la grammaire

J'ajoute la traduction (que j'ai aussi faite) en français

Beyrouth a un salut de mon coeur, Beyrouth a
et des baisers à la mer et aux maisons
A un rocher qui ressemble au visage d'un ancien marin
Elle est, de l'âme du peuple, du vin, elle est, de sa sueur, pain et Jasmin
Mais comment est devenu son goût Un goût de feu et de fumée.......

Beyrouth a, la gloire des cendres Beyrouth a,
du sang d'un enfant, porté plus haut que sa main
Ma ville a éteint sa lanterne, a fermé sa porte
elle est devenue dans la soirée seule...
Seule face à la nuit..

Tu es à moi, Tu es à moi, Ah enlace-moi, tu es à moi
Mon drapeau, et la roche de demain, et les vagues des voyageurs
Elle a montré les blessures de mon peuple,
elle a montré les larmes des mères...
Tu es à moi, Tu es à moi, Ah enlace-moi...

5 Août : To leave now, or not to leave now, that is the question

Desfois, des choses arrivent dans la vie sans qu'on l'ait voulu... J'aurais aimé vivre l'été de toutes les promesses, voir mes copines chaque jour, avoir mon diplôme entre mes mains depuis le 21 juillet...

Malheureusement, tout peut disparaître (et tout a disparu) en un clin d'oeil : tous mes projets, tous mes désirs, toutes mes aspirations...

Donc, je n'a pas d'autre choix, je suis obligée de faire avec. Faire avec la guerre, faire avec les génocides, faire avec la destruction de l'infrastructure... Telle a toujours été la vie à Beyrouth, et j'ai l'impression qu'aujourd'hui, soit ce cycle infernal s'arrêtera à jamais, soit il continuera de tourner, de tourner, comme une histoire qui se répète, l'histoire de voir des enfants mourir, des réfugiés sans maison, encore et toujours, quel que soit le contexte, et quel que soit le responsable...

Je suis parmi les chanceux de ce Liban d'aujourd'hui qui n'ont pas à sortir de leurs maisons de peur des bombardements, je suis parmi les chanceux qui ont toujours assez d'électricité par jour pour écrire dans leurs blogs, je suis parmi les chanceux qui ont toujours de l'eau et de la nourriture, je suis parmi les chanceux qui ont... une valise et un visa.

Chance ou pas, mon visa est là.

Mais, que faire? Le ferry n'est que pour les français, et il y a peu de chances que j'arrive à aller à Larnaca. Je n'irai pas à Damas, par principe. Je ne demande pas de l'aide à un régime que j'ai foutu dehors, oui moi je l'ai foutu dehors de mon pays, de mes propres mains il y a tout juste un an. Reste Istanbul et Amman... Amman reste la solution idéale, je peux y aller sans visa.

Comme je l'ai déjà dit à un ami, je pourrais plus aider le Liban si je suis à Lille et que je lance une collecte de fond, que je ne l'aide si je reste à la maison ou j'aide la Croix-Rouge. Certains personnes s'occuppent de rendre la vie moins malheureuse, comme toi, tu travailles pour que les enfants gardent de bons souvenirs et oublient la misère, malheureusement, je n'y arrive pas, peut-être que je serais plus efficace ailleurs, là où je peux rassembler de l'argent et de l'aide, je veux et je peux travailler pour que plus tard ces enfants grandissent dans une maison qui leur fera oublier la misère...

Quand j'ai fini mes examens, je me suis dite que cet été je ferais des choix qui affecteront le restant de ma vie. Je ne savais pas que ça pouvait être aussi juste, et aussi grave en même temps... Après la licence, on peut aller n'importe où, on peut se lancer dans une vie en faisant de notre mieux pour aider le Liban, comme on peut rester là et se bâtir dès maintenant une carrière... En ces circonstances exceptionnelles, chaque mot de cette dernière phrase que j'ai répétée des milliers de fois cette année, je réalise de plus en plus la fragilité de cette situation, et l'importance de la décision que je vais prendre.

Je me sens un peu coupable d'avoir la chance d'y aller, d'avoir déjà mon visa, alors que d'autres vivent dans des situations très difficiles, mais je me réconforte en disant que je vais pouvoir mieux travailler pour le Liban et être plus efficace ailleurs...

Hier, lors des bombardements de Dahiyé, la maison a carrément bougé... Il n'y a que 2 km qui séparent ma maison de l'endroit bombardé, je ne peux pas vous raconter quel est ce sentiment, d'être dans son lit, de vouloir aller voir du balcon quelle partie de Dahiye a été bombardée, mais de ne pas pouvoir ouvrir les yeux autant vous êtes fatigué parce que, la veille aussi, vous n'avez pas dormi à cause desdits bombardements... Je ne comprends toujours pas comment ma mère a fait pour avoir une famille et éduquer 3 enfants à travers 16 ans de vie comme ces dernières semaines...

Je ne sais pas où je vais être dans 10 jours, je m'en fous, ce qui m'importe, c'est que tout ce bordel cesse, et que je me réveille de ce cauchemar... que le Liban se réveille de ce cauchemar...

3 Août : Que dire de Sami Gemayel?

Voila un texte tiré du site de Sami Gemayel, fils d'Amine et neveu de Bachir, Libanoscopie et où il donne raison à l'aviation israelienne de bombarder le village de Qana. Deux problèmes : Le problème 1, c'est que l'armée israélienne ne parle plus de la raison parfaitement inventée qui dit que le toit de l'immeuble avait été utilisé pour lancer des roquettes, elle ne la mentionne plus cette raison!!!!! Le problème 2, il essaie de jouer à Bachir numéro 2 en essayant de créer un sentiment de haine dans ses lecteurs ou quoi? (et puis "enfants infirmes" ??? tous portent le même nom de famille, comme c'est beau la coïncidence), vous allez voir de quoi je parle...

CE N'EST PAS LE MOMENT d'essayer de jouer au malin en "jetant du poison" sur la situation déjà très grave...

J'aimerais juste comprendre à quoi il pense, c'est honteux et c'est révoltant, il pourra encore à jamais essayer de devenir comme son oncle, vive la paranoïa de la guerre, vive la division confessionelle??? Non je ne pense pas, très rares seront ceux qui adhèreront à cette histoire.

http://www.libanoscopie.com/FullDoc.asp?Doccode=994&Cat=2Le Hezbollah, coincé par les 7 points proposés par le premier ministre Fouad Siniora, qui mettait un plan de déploiement de l'armée libanaise sur tout le territoire et essentiellement au Sud Liban, et donc le désarmement de la milice du parti de Dieu, a voulu faire échouer ces négociations. Il a mis en pace un plan machiavélique en créant un événement qui lui permettrait d'annuler ce projet. Sachant très bien qu'Israël n'aura pas d'état d'âme pour bombarder des cibles civiles, des militants du Hezbollah ont installé une base de lancement de roquettes sur le toit d'un immeuble à Cana et y ont entassé des enfants infirmes dans la ferme intention de voir une réplique de la part de l'aviation israélienne et créer une nouvelle situation, utilisant le massacre de ces innocents pour reprendre l'initiative des négociations.


http://www.ynetnews.com/articles/0,7340,L-3285543,00.html (Yediot Ahronot)
Qana probe: IDF estimated targeted building was empty
An investigation into the killing of dozens of civilians in an air strike on the Lebanese village of Qana concluded that the military estimated the building was uninhabited and used by Hizbullah terrorists.
The probe concluded that had the military known that civilians were in the building the air strike wouldn't have been okayed. (Efrat Weiss)

1er Août : Penser un peu à autre chose

2ème semestre de fac de l'année 2004-2005 : Dans un cours intitulé "Monde Arabe : Cultures et sociétés", donné par Samir Kassir, il était du devoir de chacun de faire un exposé sur un thème bien précis. Puisqu'il s'en foutait un peu de la forme, il n'a pas demandé qu'on lui rende un travail écrit, et nous a aussi permis de former des binomes. (Il est cool ce prof non?)

Binome formé avec une copine de classe, Yara. C'était une étape importante avant de choisir le sujet de l'exposé, qui fut déterminé en moins d'une demie heure de conversation : La Musique arabe qu'on appelle aujourd'hui classique, c'est à dire du début du XXème siècle.

Quand nous avons fait notre exposé en cours, je n'avais devant moi que quelques notes, Yara aussi, et une radio avec un cd, plein des chansons hyper classiques d'Oum Koulthoum, de Sayyed Darwish, d'Abdel Wahab et Abdel Halim, des versions de Sayyed Darwish par Fairouz... Je pense que c'était durant la première semaine de mai, il commençait à faire un peu chaud, bref, le printemps de Beyrouth, quelle expression de plus utiliser pour décrire ce moment...

Je n'avais devant que quelques notes, parce que ça aurait été trop nul de parler de la musique que Samir aime tant en lisant un texte, et puis, parce que ça ne se fait plus en cours d'université (de lire des exposés)... Bref...

20 minutes de pur plaisir, à parler de la musique, à s'arrêter pour mettre 2 minutes d'une chanson pour illustrer ce qu'on voulait expliquer. Mais le paroxysme, c'était le voir chanter, le voir sourire quand il chantait... Il regardait les personnes en cours, pour voir qui connaissait les chansons, et je suis sure que son estime grandissait envers quelqu'un quand il voyait que cette personne connaissait la chanson qui passait...
Succès garanti, on avait semé non seulement la bonne humeur en classe, mais notre prof nous a confisqué le cd!!!

Et puis, est venu le satané 2 juin... Du coup, puisque mon cher prof n'avait pas encore rendu les notes du semestre, on a tous dû rédiger les exposés... Je poste aujourd'hui la partie qui me concerne, c'est à dire l'introduction, de la théorie musicale, Sayyed Darwish et Oum Koulthoum... Yara devait faire Abdel Halim et Abdel Wahhab et l'impact de l'occidentalisation sur la musique arabe d'aujourd'hui, la commercialisation de la musique arabe...


A l’occasion de l’ouverture du canal de Suez, en 1869, le khédive Ismail (1863-1876) construit l’Opéra du Caire, qui s’est vite revêtu d’une importance historique et un symbole d’occidentalisation. C’est avec la Rigoletto de Verdi en novembre 1869 qu’il fut inauguré, suivi de Aïda en décembre 1871. C’est le début d’une nouvelle ère dans la musique arabe, l’ère de l’influence occidentale dans la musique orientale, et égyptienne en particulier. Ismail qui visait une européanisation de l’Egypte, encouragea le prestige et le statut social des artistes égyptiens de l’époque comme Almaz et Abdo el Hamouli.

I – Théorie du changement musical :

En 1904, un théoricien et compositeur Kamil Al Khoulaki mentionne dans son livre, « livre de la musique orientale » (kitab al mousiqa al charqi) que le piano, l’accordéon devenaient des instruments communs dans les maisons égyptiennes, aux côtés du ‘oud.

Le développement du théâtre musical était sous forme de traduction de pièces européennes et arabisées. Ces pièces combinaient la comédie, le chant, et même parfois la danse. Les artistes les plus connus alors sont : Abou Khalil Kabbani et Cheikh Salamah Hijazi.

Entre la première guerre mondiale et la fin des années 20, on assiste à la naissance d’une nouvelle forme théâtrale, un type de théâtre musical qui ressemble aux opérettes européennes. L’un des pionniers est Sayyed Darwish, considéré comme étant le père de la musique égyptienne moderne.

Dans le congrès de la musique arabe, en 1932, au Caire, des rapports ont testifié l’impact de l’occidentalisation sur la musique arabe. Nous assistons ainsi à un genre d’acculturation volontaire du peuple égyptien, qui semble vouloir s’ouvrir vers de nouveaux horizons musicaux.

Le Maqam, la mélodie arabe, est très différente de l’occidentale ; les intervalles entre les notes, les octaves (généralement du piano – où on voit l’apparition d’un piano oriental, créé par Abdallah Chahine, à 7octaves et demi - ) et les taqasim – les formes vocales (comme le layali ou le mouwwal) sont très spécifiques de la musique arabe.

Mais la notation à l’occidentale a prévalu, donc des symboles ont été ajoutés à la notation orientale afin de répondre à la complexité de la musique arabe.

Les modes métriques, les iqa’at, influencent la nature de l’équilibre vocal, et sont basés sur les instruments de percussion : Tablah, derbakke…

Aux instruments arabes comme le qanoun, le ‘oud, et le nay, ont été ajoutés le violon occidental, le piano, la violoncelle, au fut et à mesure de l’évolution de la musique. On arrivera même à introduire la guitare électrique avec Oum Koulthoum.

La montée des enregistrements commerciaux qui d’active en 1904, l’apparition du film musical en 1932 et la création de radios publiques dans les années 30s, a aidé à une large audience pan-arabe de la musique égyptienne. Pourtant, nous pouvons dire que le monde arabe est une terre pleine de contrastes musicaux à cause des différences des traditions et des cultures allant de l’Andalousie jusqu’en Irak.

II – Sayyed Darwish

Deux citations pour commencer :

Frédéric Lagrange « Sayyed Darwish est devenu l’icône qui symbolise le progrès, la modernité et le passage de la musique orientale, une musique élitiste faite pour les Bachas et baignant dans la matrice ottomane à la musique égyptienne, la première expression figuraliste de l’âme d’un peuple et leurs demandes nationalistes ».

Philippe Vigreux (Centralité de la musique égyptienne) « Sayyed Darwish a joué un rôle crucial dans l’adoption des techniques occidentales dans l’écriture de la musique et fit augmenter l’utilisation des instruments occidentaux considérés plus capables d’exprimer des émotions »

En dépit de sa courte vie, Sayyed Darwish est un des pionniers de la modernisation de la musique arabe.

Né le 17 mars 1892, près d’Alexandrie, il fut envoyé à l’école religieuse pour devenir mounchid car sa famille était pauvre. Il étudia ensuite 2 ans à Al Azhar avant de consacrer sa vie à la composition musicale et au chant. Samir Effendi, son professeur dans l’école musicale où il étudia plus tard admira son talent et l’encouragea pour se lancer dans une carrière.

A ce moment de sa vie, il travailla comme maçon pour aider sa famille, et chantait dans des cafés locaux. Il fut repéré par les frères Atallah, une troupe syrienne qui tournait en Egypte. Ils l’ont donc invité à chanter avec eux en Syrie. Là bas, il y gagna plus en éducation musicale qu’en réputation.

Plus tard, il rentra en Egypte et continua sa carrière. Il eut la véritable réputation de chanteur-compositeur. En 1912, ses chansons étaient devenues très connues dans le pays. Mais, il était encore désavantagé en comparaison aux stars de l’époque tels que Saleh Abdel Hay ou Zaki Mourad.

En 1917, il s’installa au Caire et rencontra Cheikh Salamah Hijazi, qui l’introduit au théâtre. Il est devenu ainsi un compositeur célèbre et le créateurs d’opérettas réussies jusqu’au point où il créa en 1921 sa propre troupe.

Ses œuvres, mélange d’instruments et d’harmonie occidentale avec les formes arabes classiques et le folklore égyptien gagna une popularité immense grâce à leurs sujets sociaux et patriotiques.

A son compte, 260 chansons et 26 opérettas, et l’hymne national égyptien qu’il a composé à partir de son inspiration d’un discours de Moustafa Kamel.

Il travailla avec les deux compagnies compétitives entre elles, celle de Nagib el Kitani (avec qui il produit « el ‘achara el tayyeba ») et celle d’Ali Kassar. Il a collaboré avec Mounira el Mahdiyya et a commencé un opéra « Cléopâtre et Marc Antoine » qui fut joué en 1927 par Abdel Wahab.

Tol’it ya mahla nourha (Chams el chammoussi) – Zourouni (kolli sana marra) – Ana hawet wannathet – ana ‘achekt

III – Oum Koulthoum

Oum Koulthoum (son nom complet est Oum Koulthoum Ibrahim al Sayyed al Baltagi) est née en 1896 ou 1904 (nous ne sommes pas surs, étant en présence de deux documents non officiels) dans un petit village égyptien du delta du Nil. Son père était l’Imam de la mosquée du village où il chantait lors d’évènements religieux.

C’est d’ailleurs le père d’Oum Koulthoum qui fut son premier professeur de chant. Elle a commencé ainsi à se produire dans les villages alentours, en se déguisant en garçon pour qu’elle soit acceptée. Durant son enfance, elle étudia le Coran et en chantait des morceaux.

En 1923, la famille décide de s’installer au Caire afin d’offrir de nouvelles possibilités à Oum Koulthoum pour se produire. Elle décide alors de suivre des cours de chant et de poésie (notamment avec le grand poète Ahmad Rami), puis d’engager une troupe de musiciens pour l’accompagner. En 1928, elle est définitivement reconnue parmi les professionnels du Caire.

A noter qu’un concert consistait généralement en une chanson de quelques vers qui pouvait être étalée jusqu’aux premières heures de l’aube, alternant alto/soprano/ténor.

Dès 1934, elle se produit régulièrement à la radio nationale égyptienne, puis au cinéma à partir de 35. Le succès croissant qu’elle rencontre dans les années 30 lui permet de prendre en main les rênes de sa carrière. A partir de 1938, elle devient son propre producteur et elle négocie elle-même ses contrats. Ses chansons à cette époque sont écrites principalement par Mohammad el Qsabji pour la musique et Ahmad Rami pour les paroles. Ses chansons dans un style très égyptien incorporent des instruments occidentaux comme le violoncelle ou la contrebasse, ainsi que la guitare électrique.

Les années 40 et 50 sont une période de succès ininterrompu pour Oum Koulthoum, entourée de nouveaux compositeurs comme Zakariya Ahmad puis dans les années 50s Mohammad Abdel Wahab. Toutefois, cette gloire est entachée par des problèmes de santé à partir de 1937 et ne cesseront plus tout au long de sa vie. Il est important à souligner ici qu’elle ne se tenait sur scène qu’avec un mouchoir qu’elle tenait à la main droite. (certains disent que c’est un mouchoir rempli de coke)

Elle eut beaucoup d’amants. Mais avec Nasser, elle forma le « couple » le plus influent en Egypte, en mettant les discours de Nasser juste après les concerts de Oum Koulthoum à la TV, afin d’avoir une audience incomparable.

Après la révolution égyptienne de 1952, et surtout après la défaite de 1967, le patriotisme d’Oum Koulthoum se manifeste par son action à l’étranger pour venir en aide à l’Egypte. Elle organise une tournée dans l’ensemble du monde arabe, défendant partout où elle passait son pays. Cet enthousiasme lui valut le surnom de « Voix et visage de l’Egypte ». Elle donna ainsi deux concerts à l’Olympia de Paris.

Al Sitt, mouru le 3 février 1975. Les journaux et la radio du monde arabe informent leurs auditeurs minute par minute de l’évolution de sa santé après son attaque cardiaque, et c’est une foule de plusieurs millions de personnes qui accompagnent sa dépouille dans les rues du Caire lors de son enterrement.

Aujourd’hui encore, Oum Koulthoum reste le symbole de la chanson égyptienne, la seule et unique diva du monde arabe, avec encore 300 000 cassettes de ses albums vendus chaque année en Egypte.

Sirt el hobb – Amal Hayati – Al Atlal – Arouh lamin – Lil Sabr hdoud – Alf Leila wa Leila – Enta Omry – Ya msahharni.


En espérant vous avoir fait changer un peu vos idées, en pensant à ce monde arabe qui avait tellement de potentiel pour naître, ou renaître et pour se développer, je reprends l'optimisme d'un ami qui dit que la Nahda n'est toujours pas terminée, elle attends juste un bon moment pour qu'elle explose, elle attends le printemps...

31 juillet : L'humiliation

Les israéliens se sentent-ils humiliés? Aucun résultat militaire, et 800 morts déjà. Il n'y a que les Etats-Unis et la Grande Bretagne qui pensent que ce n'est pas grave. J'avais presque oublié l'argument que le Liban doit payer le prix de sa faiblesse parce qu'il n'a pas pu contrôler l'entrée des armes par la Syrie.

Quel autre pays du monde entier peut s'évader de toute responsabilité, encore et encore, pour les génocides gratuits, pour la mort des enfants, pour le bombardement volontaire des bureaux de l'ONU sous le prétexte de "défense légitime" ????????

Hier, je n'ai rien pu écrire, j'en rageais, je sentais que le monde entier voyait la misère qui existe dans le coeur de tous les libanais, mais que personne ne pouvait rien faire. Le monde entier observe. L'ONU observe, et n'arrive à aucune conclusion. Pendant ce temps, toutes nos aspirations, tous nos espoirs, bien qu'ils existent toujours, mais sont enveloppés de noir, comme la mer aujourd'hui... Le monde entier ne peut rien faire pour arrêter ces crimes, le monde entier ne peut pas convaincre Israël que la sauvagerie ne mène nulle part, et que s'il étaient en droit de répondre au kidnapping de ses deux soldats, ils ne sont en aucun droit de répondre de cette façon.

Comment expliquer aux israéliens qui pensent qu'il faut passer par là pour arriver à leurs objectifs que la mort de tellement de gens, est considéré comme des crimes contre l'humanité, quelles que soient les raisons derrière le bombardement. J'ai mal pour les habitant de Cana, j'ai mal pour les survivants de 1996 qui sont morts hier, j'ai mal pour les enfants qui ont survécu au bombardement de 1996 et qui survivent au bombardement d'hier. Quelle va être leur perception de la vie? Comment vont-ils grandir en des hommes et des femmes sans avoir peur d'un nouveau génocide encore?

Quand je pense à l'Etat d'Israel, qui a comme objectif principal, l'application de la résolution 1559, je me dis, "mais ils se moquent de nous ou quoi?", sont-ils conscients des résolutions qu'ils n'appliquent même pas de leur côté? Et qui vient leur comptabiliser les dizaines de résolutions qu'ils négligent? Personne.

Comme l'a dit un ami : "J'avoue que si ça n'avait pas été aussi tragique, j'aurais presque trouvé ça drôle de voir cet Etat, probablement le détenteur du record des violations, exiger l'application d'une des-dîtes résolutions. Pousser le cynisme à ce point sans se décontenancer c'est impressionant. Ce qui est grave c'est qu'en plus les autres, Etats-Unis en tête, accèptent un tel cynisme sous le prétexte de la sacro-sainte "lutte contre le terrorisme". C'est comme au temps de la guerre froide où tout pouvait être fait dans le cadre de la lutte contre le communisme, le Grand Mal, aujourd'hui c'est la même chose avec l'islamisme."

Et là, même si je ne suis pas tout à fait d'accord avec tout ce qui est dit dans ce texte, je veux bien le copier/coller ici. D'une façon particulière, il décrit parfaitement l'espoir des libanais, merci kirillo! (http://kirillo.blogspot.com/)

Israel's and the "Free" World's Disillusion
Once again, everybody is saying "Lebanon is more than just a country, it's a message!" But a message of what, you would ask? Late Pope John-Paul without a doubt meant it as a vision or a model for the 21st century mutli-cultural society!Back then, in 97, the syrians, the israelis were still occupying our land.Back then, We were only dreamingBack then, We were WEAK.so I asked : how could this weak country be a message?? now it does seems a little different.Surely his Holiness went beyond it.Today, We forced the syrians and the israelis out of our countryToday, We are showing the World how to defeat Militaristic Fascist States, whether by peaceful or brutal meansToday, this small country is even more than a message...It's true we are in a state of war, and maybe we are paying the price for some non-gratuitous 14th of March demos, but remember and mark my words: Lebanon will no longer be a "small" country, or a battlefield for anyone. This war will change world's politics, and big changes will occur starting from "Brother" Arab Doggie Countries to the United Nations Worthless Organization.Lebanon is stronger than ever and godwilling we will keep this course and lead Nations to Freedom, Sovereignty, Independance.So to the "Free" World : We will teach you these values, and you better learn from Us.

A la différence de Cyril, je pense que le 14 mars doit être divisé en deux : les politiciens du 14 mars, et l'esprit du 14 mars. Ce n'est pas pour rien que Samir Kassir a écrit "al intifada fil intifada", et moi, en tant que jeune qui adhère à l'esprit du 14 mars, c'est vrai que je suis hyper déçue des politiciens qui l'ont façonné à leur façon, mais je pense que c'est essentiellement à cause de ça qu'il existe une certaine solidarité à travers les communautés qui montrent au monde entier qu'on en est qu'une seule de société (et peu importe ce que disent les paranoïaques). Il ne faut justement pas mettre la faute aux manifestations de l'année dernière...

Enfin... Trêve de 48h, trêve rompue, ce n'est pas surprenant. Le conflit s'arrêtera, c'est une question de temps, mais ça ne se terminera pas là.

30 juillet : Dédicace

Salon du Lire en Français et en Musique, dédicace de l'essai "Considérations sur le malheur arabe"


A Marina,

Que les pages du malheur s'effacent devant ta génération,


Samir Kassir, le 23-10-2004





COMMENNNNNTTTTTT???????

30 juillet: En vrac

- Il avait l'air fatigué, sa main tremblait, au Sayyed Hassan. Mais il faut avouer qu'il est charismatique ce type, quand on commence à l'écouter, on a envie de continuer à l'écouter jusqu'à la fin. Il prouve qu'il est encore là, il a entendu le Joumblatt d'hier soir, il a lu le Nahar, et a regardé la LBC de May Chidiac avec Feltman. Je suis complètement surprise par la force du Hezb, par sa résistance sa vraie. Je ne croyais pas qu'en 2000, c'était essentiellement aussi parce qu'ils les avaient tellement fait chier que les israéliens avaient décidé de se retirer, et ça peut être considéré comme une victoire...

- Les photos, encore et toujours. Ils jouent à quoi les médias? On a compris qu'il y avait des morts, des familles entières, des enfants... On a compris le malheur des gens, mais pourquoi est-ce qu'ils continuent à nous montrer des cadavres gisants sous les décombres? Pourquoi est-ce qu'ils tiennent à manquer de respect envers ses morts et à nous filmer ce genre de choses alors qu'il se peut qu'il y ait des gosses qui regardent les nouvelles?! Si j'étais martyr, comme les enfants de Mirwahine, je n'aurais pas aimé qu'un type me porte devant tout le monde pour me prendre en photo alors que je n'ai plus grand chose à montrer...

- Les blogs, chaque jour des surprises (bonnes et malheureusement mauvaises)... Dans les uns, israéliens et libanais s'insultent, dans d'autres, ils discutent calmement, en étant d'accord sur des bases et des principes que je dirais aujourd'hui universels.

- On a besoin d'habits pour bébé à l'école publique de Furn el Chebback, c'est le 9ème mois de la grossesse d'une femme. L'indignation... Des gens qui ne pourront pas vivre sous leur toit de nouveau avant de nombreux mois, obligés à partager leur chambre avec d'autres, parce qu'il n'y simplement ni de place, ni d'endroit où aller... Et ici, peu importe si cette femme a déjà eu 9 enfants avant, c'est juste comme ça, ça prendra du temps pour que les mentalités évoluent (moi qui soutient l'hypothèse que même nos chers amis qui ont participé au 14 mars n'ont pas fait évoluer leurs mentalités avec l'esprit qui régnait à travers nos intellectuels)

- Et Samir dans tout ça? Camille, tu me dis qu'il chercherait une 3ème voie... Je pense que oui, mais ses articles me manquent, je voulais lire son article hier tu ne comprends pas, je voulais qu'il se défoule sur TOUT, qu'il foute la merde comme il l'a faite quand on était en cours avec lui la dernière fois, qu'il nous fasse réfléchir plus amplement sur ce qui se passe, qu'il nous dise de ne pas avoir peur des réfugiés dans le metn ou le keserwan, ni d'avoir trop confiance en le Hezb, et maintenant personne ne peut le faire comme lui il pourrait le faire. Personne ne peut exprimer à la fois une colère mais un optimisme vers l'avenir du Liban. Je voulais qu'il dise qu'on en a marre de subir tellement, avec le soutien hypocrite des autres voies, quelles que soient leurs perspectives respectives...

- Encore, Samir... Comment lui dire qu'il doit être là pour nous faire la leçon de ne pas avoir peur de se sentir solidaire pour une fois avec les sudistes (avec les "chiites" pour nous étudiants de l'USJ et habitants d'Ach-gh-afiyé) comme il nous avait fait la dure leçon de ne pas avoir peur de se sentir proches du peuple syrien qui subit lui aussi...

- La mer.... J'étais à Jounieh chez teta à l'aqua (probablement pour la dernière fois avant la fin du blocus - plus d'essence - ), j'ai vu la mer de près, de très près... C'est abominable. Ce n'est pas aussi désolant que de voir des centaines d'immeubles à terre, sans distinction des routes dans un secteur entier, mais c'est désolant quand même... Surtout quand on sait que la mer a subit elle aussi tellement... Les déchets radioactifs qui y ont été jeté à la moitié des années 80 (contre des armes bien sûr), puis la pêche à la dynamite, pendant des années... Même nos poissons nous désertent, pas seulement les ressortissants étrangers!

- On est seuls... Comment est-ce que l'aide humanitaire va arriver, s'il n'y a plus de route vers Rmeich et vers les autres villages complètement isolés, où il y a un manque tellement crucial de médicaments que j'ai entendu dire qu'il y a eu des cas de peste là-bas... Comment est-ce qu'elle va arriver lorsqu'il n'y a plus d'essence!!!! Sur environ 25 stations d'essence, j'ai réussi à trouver une encore ouverte cet après-midi, en rentrant de Jounieh...

- Il y a de la vie au moins, à Jounieh... Beyrouth vie, mais Beyrouth est vide. C'est bizarre, l'atmosphère qui y règne. Il n'y a presque personne, mais c'est cet air qui me donne l'impression que quoi qu'il arrive, Beyrouth survivera encore et toujours... Mon père dirait "On a vu bien pire"...

- Il était une fois, en 1967, 3 Etats arabes qui voulaient faire la guerre à Israël. Elle a duré 6 jours. Ladies and gentlemen, 18 jours, c'est 3 fois 6... A méditer, et à vous de vous sentir fiers, ou pas. Moi, je le suis, bizarrement encore, mais je ne sais pas quand ça va se terminer, ni comment... fa, jusqu'à là, comme dirait quelqu'un que je n'aime pas trop non plus, mais qui, bizarrement, trouve sa place dans mes sentiments actuels...تصبحون على وطن

26 juillet : Les Blogs

Ces derniers jours, j'ai vu sur internet l'augmentation exponentielle des blogs libanais, où chacun, pratiquement comme moi, essaie de décrire la situation avec sa perspective.

Beaucoup de blogs sont travaillés très sérieusement, et donc ont mérité mon estime, mais malheureusement, je tombe aussi assez souvent sur de la merde.

Je me permets donc de copier d'un certain blog ce petit passage, qui m'a vraiment gonflé :

"You are driving everyone away. Why do you hit towns like Ehden and Jounieh, why do you hit LBC towers and Lebanese army installations, if you are only after Hezbollah? The supermarkets are stripped bare, the streets are empty. People simply cannot stay.After you lift your siege, the only people left in Lebanon will be the poor Shia who have lost everything in the war: friends, families, their homes. Even if you succeed in destroying Hezbollah, do you think 100 new Hezbollahs won't spring up from all this misery?And where will the displaced live, now that their towns and neighborhoods have been decimated? A friend in the Chouf reports that his entire town has been taken over by southern Shia-- and their militiamen, who now roam the streets. So the Druze residents of the village have all left.In Achrafieh, Lebanese Forces members have started patrolling at night to make sure displaced people don't try to break into buildings or cause trouble in the streets. It reeks of impending sectarian conflict."

Je suis complètement révoltée par ce point de vue externe à la situation, d'une personne qui est bien libanaise et qui vit, bien évidemment à Achrafiye. Pour cette personne, il faut seulement bombarder le hezbollah parce qu'il n'existe pas là où elle vit en d'autres termes. Et puis, qui dit que les gens du Sud ont besoin de la pitié des autres libanais? Cette sorte de dédaignement envers les personnes... Les routes sont vides "ici" c'est à dire à Jounieh et à Ehden, mais comme j'aimerais bien lui montrer les photos des routes de Dahiyé qui ne paraissent même plus... Ce qui me gonfle aussi, c'est la façon dont ce blogger parle des réfugiés, des personnes qui vont venir voler et piller les maisons d'achrafiyé, ou qui vont tuer les druzes.

J'aimerais juste dire deux choses, aux chers partisans des Forces Libanaises qui surveillent Achrafiyé par peur des pillages et à ce blogger:

STOP BEING PARANOID AND STOP PITYING THOSE PEOPLE WITH THIS SCORNFUL ATTITUDE...

INSTEAD, BE GRATEFUL WHILE YOUR STREET OF ACHRAFIYE IS NOT BEING BOMBED, FEEL ASHAMED OF THE LEBANESE FORCES THAT ARE DOING SO THERE, HELP THE PEOPLE THAT ARE IN NEED WITHOUT FEELING SUPERIOR TO THE "POOR PEOPLE WHO WILL BECOME EVEN MORE RACISTS" AND HELP THEM NOT TO BECOME THAT WAY.

J'ai tellement de choses que j'aimerais ajouter, mais pour le moment je suis particulièrement gênée par ce blog...

24 juillet : L'été de toutes les promesses

En mars 2005, je m'étais dite que j'allais passer l'été le plus fabuleux et extraordinaire de l'histoire contemporaine du Liban. Le satané 2 juin, tous mes projets de pure détente dans un Liban souverain, pour la première fois depuis si longtemps s'écroulèrent comme un chateau de cartes face au vent.

En avril 2006, après mon acceptation au master de l'IEP de Lille, et avec la situation positive qui évoluait très doucement dans le pays, je m'étais promise de profiter à fond de l'été 2006 (enfin!)...

Des promesses de le passer avec mes copines chaque jour avant que je ne m'expartie volontairement pour deux ans, aux promesses de prendre en main mon propre avenir après un diplome de licence en poche... Des promesses de passer mon été entre l'Aqua et Deir el Kamar, à Beyrouth,d'aller encore une fois au moins dans le Sud, aux frontières, une fois au Assi pour une journée rafting, une fois au nord... "Khallas en été, ça sera chaque jour le happy hour au 37"... Je prendrais pleinement avantage de cette dolce vita que je mène avant de m'habituer au stresse d'une vie ordinaire à l'européenne...

J'aime mon pays, je voulais tellement passer mes derniers mois ici sans aucun souci, avec ma famille, avec mes amies, le vrai premier été pour moi dans un Liban qui n'est pas en larmes...

MAISSSSSSSSSSS....

Le 12 juillet, jour de ma soirée de promo, une semaine avant la remise des diplomes, l'été enfin attendu depuis plus d'un an, et pour certains, depuis plus de 31 ans, part en fumée.

Toutes les promesse d'un été sans précédent, d'un été révolutionnaire tant il est plein de joir et d'amour et je dirais même d'extase, d'un été de défoulement moral et psychologique dont j'avais tant besoin, toutes ces promesses ont laissé leur place à la consternation, puis à la désolation, puis au désespoir (enfin, au courage fragile avec une bonne dose de désespoir quand même).

Ce soir, je suis à l'aqua, je dors chez ma grand-mère. Au loin, j'entends clairement les bombardements sur Dahiye, et je me dis que tout le monde à la maison est surement réveillé tant le son doit être fort là-bas. Comme ce soir, je devais être à l'aqua, pas en train d'écrire au balcon, mais assise près de la piscine, avec mes copines, en train de boire une bière et de jouer aux cartes, en train de parler encore et toujours de cette remise des diplomes (qui d'ailleurs n'a pas eu lieu), qu'on attendait depuis le 20 septembre 2003.

Demain matin, j'essaierais de faire comme les autres ici, se dorer au soleil et nager, en oubliant les quatres navires israéliens au large. Mais c'est impossible d'oublier les images, d'oublier l'horreur et la misère, surtout quand je sais que je n'y peux rien, je ne peux pas arrêter les bombardements, ni l'exode massif des réfugiés, ni les morts.

Je ne peux pas arrêter la mort. Je peux me battre pour les vivants, pour les familles, pour les enfants, je le fais autant que je peux, et je le ferais encore.

L'été de toutes les promesses est devenu l'été du cauchemar perpétuel de tous les étés depuis 1975.

Finalement, j'irai, n'importe comment, mais j'irai. A Lille, je lancerais ma bataille pour le Liban. Où j'irais de là, je l'emporterais avec moi, je ferais tout pour que les gens autour de moi sachent la vérité sur toutes les injustices que subit mon pays.

Je reviendrais l'été prochain, en espérant pouvoir passer l'été de toutes les promesses depuis 2005, deux ans plus tard en 2007...

Je passerais même toute ma vie en attendant l'été de toutes les promesses. Et quand il aura lieu, dans un Liban, Etat pleinement souverain, si j'aurais 21 ou 71 ans, je ferais tout ce que je m'étais toujours promise de faire à l'été 2005, puis à l'été 2006, puis à l'été 2007, été 2008, été 2009...........

24 juillet : Il faisait noir...

Les premiers souvenirs de mon existence sur Terre, quand je les revois maintenant, j'ai l'impression qu'il faisait noir...

Quand j'ai appris à faire des beateaux en papier avec ma voisine Myriam, quand j'avais 4 ans et que j'étais dans l'abri de l'immeuble, il faisait noir...

Quand j'ai entendu pour la première fois les bombardements sauvages qui ont atteint notre immeuble et que je regardais la télé avec mon frère dans le couloir de l'entrée, il faisait noir...

Quand on a fui Furn el Chebback pour aller à Sodeco (quelle idée) et quand on a tous dormi sur un matelas géant dans le salon de mes grands-parents, il faisait noir toute la journée.

Quand, pour la première fois de ma vie, je me retrouvais sur les épaules de mon père dans un rassemblement pacifique à l'été 1990 au Mathaf, et les forces libanaises nous ont attaqué, et c'est là où j'ai appris à courir sans regarder derrière moi, il faisait terriblement noir.

Aujourd'hui, et, 16 ans après, quand j'imagine de nouveau tout ce qui s'est passé depuis la semaine dernière, je ne me rappelle des choses que quand il faisait noir, tout comme les premiers souvenirs que j'ai de ma vie pratiquement, les souvenirs de la guerre.

Ce qui est sur, c'est que, si ma conscience s'est éveillée au son des bombardements, je ne pourrais par conséquent jamais les oublier, ni oublier la peur sur le visage de tante Yvette, mon autre voisine, quand un obus est passé au dessus de sa tête. Et là encore, il faisait noir tout autour d'elle...

Mes premiers souvenirs de la vie sont noirs, obscurs, pleins d'insécurité, même si je n'ai pas eu une enfance malheureuse, loin de là. Et maintenant, j'ai l'impression que quoi qu'il se passe dans notre région, les guerres et les bombardements ne cesseront de me poursuivre, qu'on ait jeté les syriens dehors ou pas. C'est plus grand que nous, c'est plus grand que tout.

C'est peut-être pour ça que je ne peux imaginer autre chose que du noir autour de ces images de destruction.

Elles me hantent à présent, en plus des images qui circulent sur le net, elle ne me permettent pas de dormir, parce que, même si j'essaie d'aider, je sais qu'au final, je n'y peux rien, et qu'il n'y que du noir qui se rabat sur nous après un moment de clarté.

25 juillet : La Bible ou la Torah, à vous de choisir

Car les violences contre le Liban retomberont sur toi,

Et les ravages des bêtes t'effraieront,

Parce que tu as répandu le sang des hommes,

Et commis des violences dans le pays,

Contre la ville et tous ses habitants.

(Habakkuk 2:17)




Vous pouvez vérifier si vous en doutez ...

21 juillet : No words to describe

L'image parle d'elle même...

Mon rythme dernièrement se limite à deux jours d'optimisme, contre deux de pessimisme. Et aujourd'hui, je pense que c'est la journée où j'ai été le plus pessimiste... Face aux images d'aujourd'hui et des derniers jours de l'opération israélienne, je revois les images de folie, d'extase de 2005... Un autre univers. Jamais aurons-nous pensé que la situation allait dégringoler aussi vite, en un clin d'oeil, des centaines de libanais innocents dans leurs tombes, des milliards de dollars perdus, et ce n'est pas encore fini.

Ce soir, ou peu avant l'aube, une opération terrestre israélienne sera probablement déclenchée... Malheureusement, nos 8 hélicptères libanais ne pourront pas nous aider à combattre l'infanterie et les appache "ennemies". Ennemi? Qu'est-ce que ce mot veut dire. Pourquoi soudainement on se retrouve au fond de l'abîme à cause de problèmes bien plus grands que nous? Vous croirez que c'est peut-être naïf de ma part de poser des questions qui vous semblent superficielles, mais actuellement, j'ai l'impression que même la plus simple des questions ne peut pas trouver une réponse aussi facilement que d'habitude.

Où sont nos chers 31 politiciens qui ont fait leurs discours en ce 14 mars damné par ses deux martyrs et par cette population inconsciente? 31 politiciens qui ont fait des speech, pour l'avenir du Liban, pour l'avenir des enfants, pour la prospérité et la reconstruction, DISPARUS? Je dois faire des affiches, les mettre partout dans Beyrouth, peut-être que quelqu'un pourra m'aider à les retrouver. Ah, yen a quelques uns qui ont donné quelques photos à quelqu'un à l'Escwa. C'est bien.

Le comédien Wi2am Wahhab parle plus que vous. Je suis dégoutée, et je regrette vous avoir écouté débitter vos conneries en ce 14 mars, quand je savais que ce que j'attendais, ce n'était pas des discours, c'était des actions.

Bref, pour passer à autre chose, il y a une grande catastrophe écologique sur le littoral libanais. Les navires militaires israéliens ont changé leur huile en pleine mer hier. Résultat? Vous vous souvenez des images du pétrole sur les côtes de la mer du nord et de la bretagne à cause d'Erika? C'est pareil... Ils chient sur nos plages, ils chient sur nous.

De ces mêmes navires, ils envoient aussi des messages enregistrés sur des stations de radio comme Sawt El Cha3b (103.7 - assez pro-hezbollah) en disant : "où est Hassan Nasrallah? Il est caché dans vos grottes, il s'est enfui comme se sont enfuis les iraniens quand ils ont entendu la première - talka -. C'est à cause d'eux que le Liban souffre, nous trouverons Nasrallah, etc etc (avec la signature) l'Etat d'Israel".

Est-ce que l'invasion durera longtemps? Est-ce que j'aurais mon visa? Si je l'aurais, est-ce que j'aurais le courage de quitter mon pays en ruines? Aucune réponse possible pour le moment.

J'ai peur pour le Liban, et le maximum que je puisse espérer ce soir, c'est que l'invasion terrestre ne soit pas aussi sanglante que l'invasion aérienne (des deux côtés, mais surtout du côté libanais, étant donné qu'Israel a perdu 10% de ce que le Liban a perdu en termes de vies humaines). Je souffre pour les enfants morts, pour les familles massacrées, pour les maisons détruites, pour le Sud qui est une région magnifique. Peu importe si Hezbollah avait raison ou tort, peu importe si Israel le fait exprès ou pas, ma bataille n'est pas politique, ni militaire, elle est humanitaire.

19 juillet : Opinions

Aujourd'hui, c'est le 8ème jour qu'on compte des morts, des innocents...

8ème jour, et les opinions politiques fusent de partout. J'ai réussi à voir deux personnalités politiques pendant des heures et des jours en LIVE à la télé pour faire leur propagande : le comédien Wi'am Wahhab a réussi à paraitre il y a quelques jours pendant plus de 6 heures en LIVE entre Al Manar et la New TV, et Elias Atallah. Que mes amis de la gauche démocratique me pardonne, mais il n'a toujours pas répondu à l'ambassadeur israélien à l'ONU qui l'a cité du nom en se moquant de lui.

8ème jour, et je me demande si Samir Kassir était là, qu'est-ce qu'il aurait dit, de qui il se serait moqué, et surtout, de quelle façon il laisserait montrer sa colère envers les crimes de guerre qui sont commis. Jusqu'à quel point serait-il indulgent envers le Hezbollah?

Toutes ces questions, je n'en ai malheureusement aucune réponse, quand je pense que dans ces semaines difficiles, je ne pourrais pas lire sa critique, pour la critiquer moi-même, j'arrive à la conclusion qu'il était unique, et par conséquent, je me dis qu'il était indispensable et qu'on a perdu une personne immense dans ce qu'elle pouvait donner, on a perdu tout court.

8ème jour, 1 an, 1 mois, et 17ème jour, et on perd encore, sauf que, cette fois, les personnes qui ne veulent volontairement PAS aider les réfugiés d'une certaine manière, parce qu'ils sont chiites, ou parce qu'ils sont du Hezbollah, ou du Sud, ou pour n'importe quelle raison, sont rares.
Et c'est vrai, c'est très différent, la solidarité existe, je l'ai vue, je la vis, je la mène moi-même. Je pense que c'est l'apport de ce qu'on appelle "l'esprit du 14 mars", le rêve de Samir, le discours de Gebran... Plus tard dans l'avenir, les personnes qui ont toujours en tête la division sectaire du pays au point de ne pas aider humainement les autres (et pire, espérer que les israéliens continuent) mourront, comme est morte la guerre.

Et nous les oublierons.

On perd encore, mais plus tard, et je l'espère de tout mon coeur, plus tard la reconstruction sera différente, le sentiment de patriotisme, le sentiment de vouloir donner pour sauver nos concitoyens d'autres religions sera enfin ancré dans notre culture, et nul ne pourra jamais plus nous l'arracher.

Ce n'est que comme ça que nous pourrons améliorer notre sort, sortir de cette malédiction qui frappe nos 10452 km2 (ya khayye w avec Chebaa!) et montrer au monde entier qu'on a réussi, alors que tout le monde n'a rien fait pour nous aider.

17 juillet : Volontariat

Un coup de fil ce soir m'a fait beaucoup de bien moralement parlant. Un coup de fil pour me demander si j'étais prête pour faire du volontariat dans la Croix-Rouge du quartier pour recencer les réfugiers dans les écoles de Furn El Chebbak, et de faire une liste des affaires qu'ils ont besoin : médicaments, habits, n'importe quoi.

Alors demain, dès 8h30, on se retrouve pour qu'enfin je me sente utile à mon pays. Et dire qu'au début, je ne pensais même pas qu'il y aurait ce flux énorme de gens vers Beyrouth, ou qu'il y avait autant de monde qui vivait à Dahiye.

Le Liban plonge, et plonge, et replonge... Très loin dans le temps, et dans l'espace. Il suffit juste encore que le petit jardin public en face de chez moi soit un peu bombardé, pour que je me dise que j'ai 4 ans de nouveau et que j'ai envie de descendre jouer quelques coups de tennis avec mes frères sur le mur de l'immeuble/hôpital en face!

Je pense aux images que je vois à la télé, sur internet, comme ce site : http://stopdestroyinglebanon.com/WarOnLebanon/nfblog/?page_id=3
Je me dis, que maintenant, on sait que les Etats-Unis n'ont jamais été sérieux pour nous aider réellement, parce que l'année dernière on se posait beaucoup de questions à ce sujet, s'ils sont sincères, ou pas, jusqu'où iraient-ils dans leur support pour Independance 05, jusqu'où pouvons-nous leur faire confiance...

Aujourd'hui, je réalise à quel point le Liban est un jouet entre leurs mains, qu'ils peuvent en faire ce qu'ils veulent quand Bush décide de faire quelquechose avec sa bouche pleine de je ne sais plus trop quoi (durant le dernier déjeuner du G8).

Moi, dans mon petit monde, dans mon petit univers, qui se limite à Furn el chebbak depuis déjà 6 jours, je refuse de plonger, je veux aider les gens à condition qu'ils réalisent que ce que le Hezbollah fait n'est pas que Juste et Sacré, j'en ai marre de voir les images des enfants morts sur les routes, ça me hante depuis que je les ai vus, je sens que je ne peux plus rester à la maison sans rien faire et sans risquer quoi que ce soit quand il y a des enfants, des bébes, qui meurent sans raison. Au moins, j'aurais la conscience un peu plus tranquille, je verrais que tout va se remettre en place peu à peu dès que ça se terminera et je saurais que je suis en train de contribuer à rendre la vie des réfugiés un peu moins misérable et malheureuse qu'elle ne l'est déjà.

17 juillet : Désastre

J'ai l'impression que ce blog devient un peu comme un journal de guerre!!! Je n'ai rien d'autre à faire, je reste là, à la maison, à ne rien faire, à me désoler sur le sorts de mon pays, en sursautant quelques fois à cause de bombardements...

Qu'est-ce qu'ils bombardent encore à Dahiye? les deux immeubles, le QG du Hezbollah et la télévision Al Manar se sont écroulés, ils ne sont plus que cendres et ruines, et ils continuent de bombarder au même endroit...

Hier, il y a eu un reportage sur NewTV qui m'a plu. L'Arabie Saoudite a promis de donner 50 millions de $ pour aider les réfugiés et la reconstruction. Mais, avec la hausse du prix du baril, et avec quelques calculs, en gardant leur production normale par jour, ils réussiraient sans rien foutre à avoir un bénéfice de 45 millions de $ PAR JOUR. Génial non? Et après bi rab7ouna jmilé avec 50 millions!!!! Ils gagnent tellement à cause de nous, de notre crise, de notre désastre, et eux, grands seigneurs décident de nous aider avec cette maudite somme!!! (Je ne veux surtout pas défendre l'Iran, mais au moins l'Iran n'a pas dit combien, l'Iran a dit qu'elle reconstruirait tout et point final)

Bon, c'est officiel, il n'y a plus d'essence, ou presque, il n'y a plus de citrons, ils ont bombardés Iqlim el Kharroub, qui est une région du Chouf où il n'y a pas de hezbollah et même pas de chiites.

De Villepin vient cet après-midi, pour "soutenir le peuple libanais" (et on parle de désastre), Solana et Rod Larsen sont déjà là. C'est trop cool, j'ai envie qu'on fasse un groupe et que j'aille leur faire un petit road trip dans mon Liban pour leur montrer les cèdres du Barouk et le chateau de Beaufort. On ira aussi déjeuner au Berdawni de Zahle avant de faire du rafting dans le Assi! GE-NIAL.

Ils vont tous dire que c'est inacceptable, que c'est disproportionné, qu'il y a déjà beaucoup de morts, des civils, des femmes, des enfants, que le Liban ne mérite pas, qu'il est pris en otage.... Ils vont prendre leurs ressortissants et ils vont rentrer chez eux. Et Voilà, le tour est joué!! Alors que nous, on a perdu 24heures d'eau d'essence et de nourriture parce que rien ne s'est passé.

J'ai toujours lu dans les bouquins qui parlent de la guerre, des relations tacites entre la Syrie et Israel, mais ça fait vraiment mal quand j'arrive à voir un accord parfaitement tenu par les deux parties, c'est tellement évident pour moi que ça me fait mal...

J'ai l'impression que je vis une autre vie que celle que je vivais il y a une semaine. C'est comme si tout le Liban avait switché de planète, de monde, d'univers. Un jour, je me demande à quelle plage je vais aller, pour après me demander où je vais aller boire un verre en happy hour, et maintenant, je me demande quel numéro d'Historia entre 1963 et 1981 je n'ai pas encore lu!!!

Maintenant, je ne sais pas ce que les israéliens vont faire, ils ne peuvent pas continuer à bombarder comme ça, comme des débiles, en espérant que le Hezbollah va arrêter parce qu'il n'a plus rien. Tout le concept d'une milice c'est de montrer qu'il n'y a rien à la base... Le Hezbollah continuera, et les débiles ne sont pas du tout débiles, ils savent que le Hezbollah ne s'arrêtera pas. Alors, pourquoi ils continuent? Peut-être ont-ils besoin de temps pour préparer un autre genre d'offensive, ou c'est un terrain qu'ils veulent "stable" pour le moment avant d'organiser une meilleure défense face à autre chose...

Pensées pessimistes

La pression internationale sur l'Iran est bel et bien grande, de plus en plus importante, et est due à la réunion du G8 qui a commencé aujourd'hui, mais je ne suis pas d'accord avec toi pour dire que c'est le dernier baroud d'honneur iranien...

Premièrement, on ne sait toujours pas comment les choses vont évoluer, les campagnes aériennes simples n'ont JAMAIS réussi leurs missions sans une campagne terrestre, il suffit de revoir les faits de l'Histoire pour s'apercevoir que si Israel n'entre pas dans le territoire libanais, et si le Hezbollah est considéré "vaincu", il ne faut pas être trop enthousiate pour déclarer sa disparition. Parce que, qu'on le veuille ou pas, le peuple (désolé pour la ta2ifiyyé) chiite est trop attaché sentimentalement au mouvement de la résistance islamique, et encore plus attaché à la personne du Sayyed.

Donc, étant donné le culte de la personne et le culte du mouvement de tout une partie de la population, si Nasrallah est tué, si Hezbollah est complètement annihilé, ça ne voudra pas nécessairement dire que l'Iran a perdu sa "base d'action" à travers les chiites. Il faudra bien plus que des bombardement aériens pour venir à bout de l'engagement des chiites dans les actions menées par le Hezbollah.

Je ne veux vraiment pas être pessimiste, mais je dois ajouter à cela une déclaration d'Ahmadinejad dans laquelle il propose de reconstruire avec le budget iranien toutes les infrastructures détruites par Israël.

Quant à la Syrie, sa prise de position ne va pas à l'encontre de l'objectif israélien, et donc va avec les avantages américains dans la région pour le moment : Les expatriés américains passeront éventuellement par la Syrie pour rentrer chez eux, et la Syrie refuse de faire quoi que ce soit, donc laisse Israël faire ce qu'elle veut au Liban. Tu comprends alors pourquoi je pense que la position iranienne actuelle n'a rien à voir avec la position syrienne lors de l'assassinat de Hariri. Des documents qui sortent maintenant nous montrent que la Syrie avait planifié le retrait de ses troupes du Liban bien avant le 14 février 2005. Je ne trouve pas que c'est trop comparable comme situations.

Pour Israël, je vois mal maintenant comment la campagne aérienne va être menée à fond, aujourd'hui ils ont bombardé la route de Hasbaya, donc s'ils voulaient entrer dans le territoire, ils auraient pu passer par là, alors qu'aujourd'hui, c'est pratiquement impossible, et avec tous les ponts et le blocus total du nord et de hasbaya/marjeyoun, aucune invasion n'est pratiquement possible, et à mon avis le Hezbollah ne pourra disparaître avec cette facilité.

Il faut faire attention au flux des expatriés qui rentrent chez eux. Aujourd'hui, les Emirats Arabes Unis, la France, les Etats-Unis ont imaginé plusieurs scénarios pour leurs ressortissants respectifs pour les ramener chez eux sans danger. Deux hypothèses pour les français : Beyrouth-Tripoli-Lattaquié (de là soit par la mer, soit par un avion d'Istanbul) ou directement par un navire français qui demande la persmission des navires israéliens d'aller recupérer ses ressortissants du port de Jounieh ou de Beyrouth.

En ce qui concerne la période post-crise/post-guerre, le Hezbollah se tranformera surement, mais sa forme de résistance islamique à Israël ne disparaitera pas. En plus, on ne doit vraiment pas s'inquiéter au sujet du dialogue national, pour moi, cette expérience est tombée à l'eau, et si elle reprend, cela ne veut pas dire qu'il y aura un problème pour que Nasrallah devra s'expliquer clairement. S'il est encore vivant, il s'expliquera très clairement, il n'a jamais caché ses intentions, ni son histoire, je ne vois pas pourquoi il aura du mal à s'expliquer. Ce sont probablement les autres parties au dialogue qui ne sauront pas comment réagir à cette réalité. De toutes façons, on ne sait pas si l'ère du dialogue national va continuer après tout ça. Pour le Hezb, ses intérêts libanais et ses intérêts iraniens sont les mêmes. La priorité va toujours au combat contre Israël, jamais aux problèmes internes du Liban.

Le Liban est malheureusement pris en otage, parce que Olmert, qui sait qui est derrière tout ça, n'ira pas sortir les vers du nez de celui qui est à l'origine de "tout ça". Au contraire, c'est quelque chose de très facile qu'Israel peut faire pour un moment : Casser le Liban, donc en même temps, casser le Hezbollah et casser la croissance du Liban. Pourquoi casser la croissance du Liban? Parce que c'est plus sur pour eux, économiquement bien sur. (même si avec notre croissance on est toujours à des années-lumières mais bon).

Ce n'est peut-être pas finalement une question de lâcheté. Ils ont surement des objectifs à plus long terme de cette offensive. Ou peut-être que c'est la seule chose qu'ils peuvent faire pour le moment, en attendant de frapper plus fort la Syrie, ou pas, si la Syrie continue à coopérer tacitement!!!!