Le rêve est en nous...
Ce soir, il y avait une expo et un concert pour Samir. Je ne m'y étais pas préparée mentalement, et dès que j'ai vu quelques photos, j'ai senti une lourdeur dans l'atmosphère, et un dégoût. Probablement le même dégoût du satané jeudi 2.
J'ai reconnu quelques visages, j'ai parlé avec certaines personnes, mais je n'étais pas là... Je pensais à lui, à ce qu'il pourrait avoir comme commentaires sur la situation actuelle, s'il serait encore avec ce qu'on apelle les forces du 14 mars, ou s'il s'en serait détaché un peu... Qu'est-ce qu'il aurait dit de Walid Joumblatt, qui change de position à chaque fois qu'il respire, et qui, paradoxalement, gagne de plus en plus de popularité... Honte à ces gens-là qui lui donnent encore de quoi changer de position encore et encore et infiniment... Pour ne plus savoir à la fin qui était son ami d'hier, son ennemi d'aujourd'hui et son ami de demain... 1984 adapté au cher Beik.
Avant le début du concert, on nous a annoncé qu'il était interdit de fumer. Aussitôt, et comme il l'aurait fait sans doute, j'ai ouvert mon sac, sorti une cigarette, et je me suis mise à fumer tranquillement, ça m'a fait du bien!! Tous mes souvenirs, toute cette lourdeur, se sont envolés avec... Mais le dégoût, impossible... Toujours là, et plus fort qu'avant...
Demain, le dialogue reprend... Mais pour qui, si ce n'est pour ceux qui sont au premier rang? Tous! Ne croyez surtout pas qu'ils le font pour nous... Ils le font pour eux, pour le fait que leurs noms soient à jamais gravés dans l'histoire du pays, encore plus qu'ils ne l'étaient en temps de guerre... Sans doute, ils ont du se mettre à l'évidence que leurs actions doivent être plus portées vers le consensualisme, histoire de se dire "j'ai la conscience tranquille maintenant, au moins, ma chronique de guerre a été effacée dans la mémoire collective du peuple"... Et là, où tous nos espoirs se portent, vers les réactions du peuple, s'élève une forteresse de naiveté et limite d'innocence... Comment pouvez-vous vous attendre à quoi que ce soit d'un dialogue formé de gens qui se sont fait la guerre pour la lutte du pouvoir? Et pour ceux qui croient que certains de ces leaders ne l'ont pas fait QUE pour leur gloire, comment faites-vous confiance à ces leaders qui veulent continuer à faire de la politique alors que leur temps est révolu? Qui suis-je face à ce peuple d'ignorants qui suit encore leurs leaders même s'ils disent deux choses contradictoires en deux minutes?!
Pour eux, je serais quelqu'un qui ne comprends rien. Et peut-être que je ne comprends rien. Peut-être que ces leaders se sont réunis en pleine bonne foi, et pour "sauver le Liban"... Mais encore une question... Sauver le Liban de qui? de quoi? Moi, j'aimerai bien sauver le Liban de personnes comme vous... Demain, le dialogue reprend, et les comptes de guerre reprennent aussi... Pour ces 30 dernières années, on va avoir besoin de 60 années de dialogue.
On m'a dit que je suis devenue réaliste, mais je pense que je l'ai toujours été, la différence, c'est que maintenant, je suis pessimiste... Je n'arrive pas à voir ces vieux prendre des décisions à ma place, au moment où quand ils avaient le droit d'en prendre, en ont pris des mauvaises. Pourquoi je vais être sure que maintenant ils prendront les bonnes décisions? Parce qu'ils sont tous à la recherche de la vérité?
Non. Ils sont tous dans le même petrin. Ils doivent sauver leur peau, depuis le 21 février 2005, où ils ont vu que les libanais commençaient à avoir une opinion publique, ils les ont surpris... Ces leaders, ont bien repris le dessus, ils ont su rendre de nouveau le peuple dupe de leurs espoirs et de leurs promesses sans avenir...
Pourquoi tu n'es plus là pour commenter ce qui se passe? Et pour que je commente ton article?
Je pense encore à lui, surtout en ces moments, je vois son sourire ironique et son sarcasme face à des situations diverses, je vois tout l'espoir qu'il porte vers les jeunes... Et je vois que les jeunes ne répondent pas à ses conseils... Ils continuent de se battre pour des questions qui n'appartiennent plus qu'à l'histoire... Ils continuent de se battre, parce que leurs leaders de guerre sont toujours sur la première page, où qu'ils aillent, et c'est comme si toutes leurs fautes commises durant la guerre n'ont jamais existé, ou même le fait qu'ils y aient participée, ne donnant même pas un choix d'alternative au peuple. (Et je parle même pour le CPL - chose qui peut paraitre choquante sortant de moi...
Et nous... Nous sommes trop peu nombreux pour faire quelquechose... Tout ce que nous pouvons faire, c'est rêver... Alors, le rêve est en nous, le rêve est en moi, je ne porte plus autant d'importance à tout ça de toutes façons, ça m'a bien l'air absurde de vouloir garder les gens de la guerre en position de force... Je rêve, d'un Liban où les politiciens connaissent leurs limites, et où le peuple connait sa force d'action, où j'ai mon mot à dire, moi, jeune fille de 20 ans, qui aura à payer durant toute ma vie et durant la vie de mes enfants les fautes et dettes commises par ces leaders qui veulent faire renaître le Liban qu'ils ont écrasé sous leurs propres pieds un jour.
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