A l'aide, on tue nos intellectuels!
excuse-moi Gebran...
Cruellement, et beaucoup plus forte que les autres, l'explosion qui a pris ta vie était bien ciblée... De multiples voyages à Paris, les bodygards, la sécurité au bâtiment du Nahar, tout ce que tu as fait pendant ces derniers mois, je m'en moquais souvent... Surtout après l'assassinat de mon prof, surtout quand j'ai vu que tu étais à droite de sa mère lors du premier jour des condoléances... Je savais qu'entre vous deux, ce n'était pas le meilleur des mondes. Aujourd'hui, même si vos chemis ont été très différents, vous êtes tués pour la même raison: vous dérangez.
Bordel!!! VOUS DERANGEZ!!! La semaine dernière tu as dit qu'il fallait trouver ces putains d'officiers baathistes et les juger pour ce qu'ils ont fait à nos officiers le 13 octobre... Même so ti ne faisais pas partie au début du groupe de députés qui militaient avec Solilde, tu t'es vite trouvé engagé. Et pour cause : Malgré ton parcours, que je trouve un peu opportuniste, tu es bien un homme qui s'est engagé, qu'on le veuille ou pas, tu aimes ce pays, du moins autant que nous, tu veux son bien, et encore plus, tu t'es battu à nos côtés, à côté des jeunes lors de ces longs mois de sit-in au centre-ville, tout comme Samir Kassir, mais certainement pour d'autres raisons...
Je me souviens lors de la séance parlementaire du vote de confiance du gouvernement, et sans vouloir faire de la propagande, le général avait expréssement demandé au ministre de la défense et au gouvernement, de mettre en priorité numéro 1 la mise en place d'une carte du Liban avec tous les points rouges, non accessibles à l'armée, anciennes bases palestos, camps palestos, autres camps etc... Ce plan sécuritaire n'étais pas aussi omportant pour le gouvernement, qui avait choisi à l'époque, et qui choisis encore et toujours de ne pas se mettre face-à-face de ce problème, entraînant une chaîne d'attentats, puisque rien n'est fait...
En ce moment, je pense à Ghassan... Quand il parlait de notre prof, comme il l'a fait il y a quelques jours en recevant du premier ministre français une médaille de légion d'honneur, il était clair qu'il le considérait comme son fils... Je me rappelle la seule fois que je les ais vus ensemble en face de moi, c'était quand Samir signait "Considérations sur le malheur arabe" dans le Lire en Français de l'année dernière... C'est bien bizarre mais ce même jour j'ai aussi vu May Chidiac...
Je viens de voir les nouvelles de midi de France 3, il y était invité le 21 octobre dernier, ils ont fait un reportage... Il y a dit que "La Syrie utilise la force, les explosions, les attentats... Mais je pense que nous sommes au bout du tunnel"...
Mais à l'aide, on nous tue nos représentants, notre élite, nos intellectuels! Que quelqu'un fasse quelquechose... Sinon, d'un côté on aura les vieux de la guerre, et d'un autre côté on aura les jeunes, qui ne sont pas encore prêts pour prendre le relais de gens comme Samir Kassir et Gebran Tuéni... Et qui nous reste-t-il dans le Nahar? Je me sens coupable de ne pas avoir cru en les craintes de Gebran, et il voyait ça venir... Mais il a aussi vu que nous sommes au bout du tunnel...
Je pense à lui, et je penserai à lui quand nous serons enfin hors de ce tunnel, je penserai aussi à tous nos martyrs, partis aussi gratuitement...
Mais on ne demande RIEN!!! Laissez-nous vivre en paix!! On veut évoluer, on s'en fout si vous ne voulez pas vous ouvrir au monde... Occidentalisés, ou orientalisés, arabisés, nous sommes le mélange de tout ce monde et nous en sommes fiers... Et quoique vous fassiez, nous le resterons, nous resterons l'espoir des peuples du monde arabe de voir leurs printemps s'approcher... Et, que nous le voulions ou pas, Beyrouth sera le printemps des arabes.
A Gebran, excuse-moi, même si çca ne sert plus à rien maintenant, je n'avais aucun droit de critiquer tes peurs, j'espère qu'entre toi et Samir, puisque maintenant vous faites partie du même monde, vous allez mieux vous entendre...
Que la course contre la montre s'arrête enfin, on veut nos hommes, nos intellectuels, et en même temps notre liberté, et pas une condition des deux!
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