J'aimerais bien pouvoir consacrer un peu plus de temps à ce blog. Mais lorsque j'y pense, je me demande quelle serait bien la raison pour laquelle je perderais mon temps à y laisser mes impressions sur les différentes attitudes de mes chers compatriotes ici ou là... Eux pour qui l'histoire n'est ni linéaire ni chaotique, mais bien circulaire...
Il est vrai que le nombre de blogs libanais continue de croître, et ce, dans toutes les langues que nous chérissons. La blogosphère s'étoffe, diraient les uns... Je dirais que la blogosphère commence à peu près à reproduire les mêmes shémas socio-politiques qui existent dans le pays, à commencer par le choix de la langue qu'on donne à nos blogs.
Créé en 2005, le lendemain du satané 4 juin, mon blog avait pour but de crier toute la rage du monde qui jaillissait de mon coeur avec la puissance inconsciente d'une jeune désillusionnée. Une sorte de canalisateur de frustrations politiques, et de catalyseur d'évènements qui ne fait que prouver l'incompétence, la nôtre, de sortir de la logique de guerre face à la construction d'un Etat de droit qui ressemblera tout au plus à un gouvernement de féodaux du Moyen-Age et d'autres paysans ayant pu se hisser au rang de Criminel National.
Relativisant mes prises de position politique selon qu'on soit en état de guerre ou de calme relatif, je suis arrivée en ce moment à un niveau d'apathie généralisé. Si on n'a jamais pu discuter au calme avec un partisan FL, on peut de moins en moins le faire avec un aouniste, et on considère encore et toujours Samir comme rien qu'un gauchiste pro-palestinien alors que ces textes de 2005 devraient faire office de bible pour tous ceux et celles qui appartiennent à l'esprit du 14 mars.
Que de textes m'ont permis de montrer la différence, entre l'esprit du 14 mars, et ce qu'on voit aujourd'hui, un simulacre de rassemblement politique... J'ai toujours en tête l'écho de la voix de mon frère qui m'a dit, le 13 mars 2005: "Tu verras, ils ne feront rien, tu te donnes à fond et tu t'en morderas les doigts de regret".
C'est vrai, j'estime que je me suis donnée à fond. J'étais élue dans le bureau de l'Amicale des étudiants, je participais à toutes les réunions préparatoires aux grandes manifestations et sit-in qui s'en est suivi.... Je séchais les cours, qui ne comptaient plus d'ailleurs que deux étudiants tout au plus, sans oublier l'absence de certains professeurs eux-mêmes engagés dans cette frénésie nationale. Je mangeais les sandiwichs distribués par Nora Joumblatt et "Al moujtamaa al madani", plus connus aujourd'hui sous le nom de Amam 05, qui ont quand même réussi à aspirer toutes les aides envoyées par l'extérieur pour notre sit-in.
J'en ai écris des masses, et j'ai l'impression que je ne cesserais jamais de revenir sur cette époque, en retrospective, juste pour réaliser, pour une ènième fois, à quel point on a été cons de croire qu'ils allaient nous suivre à nous.
Ensuite, il y a eu la guerre.
C'est là où j'ai vraiment et profondément pris conscience que le Hezbollah rassemblait à lui seul le tiers du pays, territoire et population, et qu'il fallait donc peut-être arrêter de le diaboliser, et négocier un moyen de régler les différends qui existent, si on cherche vraiment à sortir de cette dynamique stérile et d'ailleurs externe. Mais comment? Je n'en sais rien, si on continue de se taper dessus sur des histoires qui datent du siècle dernier...
Et puis revenons à cette histoire... Incomprise, inconnue, celle où 3 versions peuvent encore coexister aujourd'hui dans un pays qui ne l'a toujours pas dépassée. En termes sciences poteux, la Réconciliation nationale ne peut être déclenchée que par un effort de compréhension et de rédaction de l'histoire telle qu'elle s'est déroulée: comités locaux, historiens engagés (dans le souci de la véracité de l'histoire évidemment), anciens responsables politiques, militaires et miliciens qui pourraient enfin produire une bonne chose pour le pays... Et puisque notre histoire reste non-écrite (ou écrite mais non "certifiée", en référence au dernier ouvrage de Fawwaz Trabelsi), la Réconciliation tarde à arriver, même 20 ans après la fin de la guerre.
Du coup, tout le jeu politique s'y retrouve faussé, toutes nos analyses, et tous les commentaires haineux de tous les blogs libanais aussi.
2007, 2008, 2009... Les coqs continuent de chanter sur leurs amas (respectifs) d'ordures... La propagande se poursuit de plus belle, et le cercle vicieux aussi.
Alors écrire plus souvent, "Oui, il le faut ! Ja, es muss sein !" ;)
Pour rappeller à mes amis, connaissances et environnement lointain qu'on s'est fait prendre comme des lapins, que je ne le répèterais jamais assez, mais qu'il n'est jamais trop tard de faire preuve d'initiative (y a quelqu'un?)
Pour dire aux autres que les libanaises sont plus que de simples pintades, et que la jeunesse n'est pas que dorée (bien qu'elle soit tout autant insoutenablement légère)
Pour se libérer du fardeau de l'inconscience politique de certains
Pour hurler au monde occidental que les "pro-occidentaux et démocrates" du 14 mars sont loin d'être démocrates et qu'il est temps pour des dizaines de partis de se dissoudre par eux-mêmes pour d'innombrables raisons...
Pour se rappeller de temps en temps de la définition du mot "anticonstitutionellement"
Pour condamner Israël jusqu'à nouvel ordre, mais pas les juifs, et qu'il faut toujours savoir faire la différence en dépit du fait qu'Israël ne le permette pas en considérant tous les juifs du monde comme sa diaspora,
Pour chercher l'odeur du jasmin dans ma ville,
Pour ne pas oublier mon prof.
Mais que c'est triste d'avoir cet air mélancolique alors que je fête mes 24 ans demain.... Alors, c'est fini les rétrospectives, les souvenirs, les malheurs, les frustrations. On n'est pas sortis de l'auberge si la jeunesse n'arrête pas de se plaindre. Donc, dès demain, je tenterais d'être un peu plus constructive, de faire évoluer les problématiques vers des débats anti-conformistes de préférence.
D'ailleurs, voilà pour terminer, une excellente façon de passer à autre chose: un très sérieux ouvrage sur les pintades à Beyrouth!!
Présentation de l'éditeur: "À Beyrouth, les pintades ont du vent dans les voiles, des talons à flanquer le vertige à l'aiguille du Midi, des griffes manucurées en toute saison. Ici, être belle est un devoir. Jonglant habilement entre toutes les influences culturelles, elles chérissent leurs mezzés autant que leurs smoothies. Et quand elles ont fini de se demander qui elles sont exactement (chiites ou maronites, de la montagne ou de la plaine, du Nord ou du Sud), elles se retrouvent sur la Corniche, sur le front de mer, pour voir autant que pour être vues. Émancipées et pleines de tabous, féminines et militantes, superficielles et courageuses, les habitantes de Beyrouth sont pétries de contradictions. Femmes soumises, les Libanaises ? Vous repasserez. Les Pintades du Levant vont vous ébouriffer les plumes. Et vous pourriez même décider d'en prendre de la graine (de boulgour). Une pintade n'est ni une poule ni une dinde, ni même une caille, et certainement pas une bécasse, mais le symbole de la femme d'aujourd'hui, sérieuse et frivole à la fois. Dans une ville sous tension qui risque de déraper à tout moment, être une pintade est une déclaration de guerre à la guerre."
Je cours l'acheter!
3 commentaires:
j'ai eu le même cheminement que toi mis à part que j'avais de l'apathie vis à vis à la politique avant 2005, avant de redécouvrir ce monde durant les évènements.
J'ai aussi eu mon coup de blues, il y a de cela quelques temps, mais il faut persévérer. J'étais à un 3 billets par jour en 2005 ou 2006, maintenant je retarde mes rédactions à une semaine. (mon blog a subi quelques contrecoups durant certaines périodes qui lui ont fait subir une cure d'amaigrissement)
Peut être faut écrire moins mais être plus analytique ... ca c'est de mon coté.
et Bon anniversaire :).
A 24 ans on doit toujours s'intéresser à son pays.
Le Liban, c'est un peu une relation sado maso, on l'aime, mais qu'est ce qu'il nous fait souffrir ... à cause des libanais
Merci Frenchy :)
C'est un vrai dilemme... Ecrire trop souvent fait diluer les gros tournants et analyses (et d'ailleurs on n'a pas le temps)...
Ecrire moins souvent en voulant être plus analytique... mais l'analyse risque fort de se ressembler au fil du temps... Pour moi tout commence à se ressembler, et tout est directement déconstruit dès lors qu'on rappelle les rôles des acteurs locaux et internationaux au Liban/Moyen-Orient.
Et dans ces deux cas de figure, nous ne sommes que des blogueurs qui laissent libre cours à leur écrits et qui n'influencent pas grand monde. Mais bon, au moins, notre conscience est plus tranquille...
Bonjour Marina, comment vas tu? Cela fait longtemps que je n'ai pas eu de tes nouvelles. Je viens de lire ton texte, continue à écrire que tu es vraiment douée. Si tu es au Liban, ça me ferait très plaisir de te voir. Guy
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